Philippe Forest critique descriptif

Philippe Forest a rassemblé  ici certains de ses textes sur l'art de diverses époques : de Hubert Robert et Hippolyte Flandrin pour le XIXe, Picasso et Chagall pour le XXe siècle, Fabrice Hybert et Yayoi Kusama pour les contemporains. 

Dans la même veine que ses précédents essais sur Raymond Hains ou Araki Nobuyoshi (publiés dans la même collection en 2004 et 2008), ces textes sont des chroniques littéraires que le romancier publiait  dans Art Press.
Ils ont fait de lui un critique incontournable d'un domaine qui a priori n'était pas le sien.

Comme pour se légitimer l'auteur prouve que l'art – s'il appartient aux créateurs, aux historiens de l’art, et aux critiques –  reste tout autant l'apanage de ceux qui tiennent, un autre discours sur l’art [...] et assument explicitement sa dimension subjective et l’ignorance relative sur laquelle il repose.
Pour autant ce livre demeure très souvent au niveau d'une pure description sans pour autant que des parti-pris marqués permettent de soulever des questions essentielles. Or, que l'écriture soit littéraire ne justifie pas pour autant des approches sinon quelconques du moins anecdotiques.

L'auteur reste fidèle à sa stratégie et sa pratique en jouant sur l’entrelacs de divers registres. Il se contente de reprendre l'actualité, l'existence et la réception qui ont consacré ses œuvres par différentes instances de légitimation, de pratiques et de savoir politiques, culturels autant qu'esthétiques.
Sous l'effet de la pression (du marché, de la critique, du pouvoir, etc.) toute œuvre acceptée lui semble susceptible de fournir quelques illusoires bienfaits. L'auteur ignore que cette reconnaissance a plus valeur de poudres de divers perlinpinpin que de pilules amères.
L'auteur nous les fait ingérer souvent en fonction de leur étiquette. Pour Forest elle peut tenir d'éthique selon lui-même. Dès lors et en dépit de la  position qu'il se donne , il  reste le parfait lieutenant d'un cénacle restreint dont "Art Press" fut longtemps le lieu tenant - parfois vivifiant, parfois démagogique.

Le critique appartient à cette deuxième tendance. Contrairement à ses deux livres qui précèdent  il a ici  du mal à convaincre que les œuvres mises en exergue  (à l'exception de celles de  Picasso et Hybert) sont porteuses d'une alchimie capable d'ébranler le regard. C'est bien pourtant ce dernier qui reste non la plus moderne mais la plus neuve question de l'art.
 

Jean-Paul Gavard-Perret

Philippe Forest, Éloge de l’aplomb et autres textes sur l’art et la peinture, coll. Art et Artistes, Gallimard, novembre 2020, 216 p.-, 22,50 €

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