La littérature sans idéal

La littérature contemporaine est-elle encore de la littérature ? l’avalanche de romans qui font le gros des publications répond-elle à une exigence poétique — « en tant que forme d’expression accomplie qui permet la synthèse de la maîtrise technique et de l’expression d’une personnalité » — ou bien n’est-ce qu’une réponse à la société des loisirs, un « simple divertissement culturel » ? Philippe Vilain pose franchement la question dans son très riche essai sur La Littérature sans idéal, identifie les causes de cette déchéance, et dénonce une littérature qui ne tient plus ses promesses de voix singulières en étant devenu une branche de l’uniformité mondialisée qu’est le tout divertissement dans lequel l’écrivain admet sa « soumission à la marchandise », « sûre de m’émanciper [de ses pères, du style , de l’art même] alors qu’elle ne fait que se soumettre [à la kulturindustrie dont parlait Adorno]. »

 

Une littérature coupée de l’Histoire peut-elle s’inscrire dans le temps ? C'est ce que tente de montrer Philippe Vilain en puisant ses exemples dans la littérature contemporaine, la bonne (celle qui s'inscrit dans le temps culturel) aussi bien que la mauvaise (celle qui nie le lien et les héritages). Il y a pour ainsi dire un avant et un après Proust, figure tutélaire majeure du panthéon de Philippe Vilain, à l'aune duquel il passe compare les pauvres invertébrés de l'immédiateté et du tout à l'égo (pour reprendre une formule de Luis de Miranda).


Un essai d'une admirable force, qui condamne la médiocrité de la lie informe qui sert de littérature aujourd'hui — disons le roman formaté et commercial — tout en rappelant au lecteur l'horizon supérieur où porter le regard. Salutaire !

 

 

Loïc Di Stefano

 

 

Philippe Vilain, La Littérature sans idéal, Grasset, mars 2016, 156 pages, 16 eur

1 commentaire

Le constat est fondé mais la démonstration pénible. Je n'ai pas réussi à achever la lecture de cet essai. Le style est - comment dire... ? - bien trop "ésotérique" pour moi alors que les textes d'un Philippe Muray ou d'un Jean Clair sur l'inanité de la création postmoderne sont toujours éclairants. Perdre le lecteur en route quand on veut démontrer la vacuité des 99% de la production littéraire actuelle est contreproductif. Dommage.