Un "Manifeste pour la psychanalyse" qui remet les pendules à l'heure !

Pour ou contre la psychanalyse ? Là n’est pas la question. Point ici de controverse. Il s’agit plutôt d’un état des lieux. Une manière de rappeler toute la richesse du mouvement psychanalytique. Car l’entrée dans le 21e siècle démontre une certaine perte de crédit. Le monde des idées rit de la psychanalyse. A tort nous démontreront les auteurs de cet ouvrage. Car, rappelons-le, une expérience analytique conduite à son terme n’a pas d’équivalent. Son issue ouvre à une délivrance. Car elle propose une réponse concrète, singulière, sans pareille et sans égale à la pulsion de mort.


Et malgré cela. Malgré Lacan qui lui redonna une seconde vie, la psychanalyse n’en continue pas moins de provoquer la défiance et les tentatives de rejet. En 2003 le projet de loi Accoyer tentait un amalgame étonnant et évoquer un public sous la menace de "charlatans". Pourquoi tant de haine ?


Sans doute en partie parce que la zizanie règne dans le petit monde des thérapeutes. La Société psychanalytique de Paris d’un côté. Ceux qui se réclament de Lacan de l’autre. Comme arbitre l’Ecole de la Cause freudienne. Puis des groupuscules comme l’Espace analytique. L’Association lacanienne. Etc. De quoi faire fuir le patient. Voir rouge les pouvoirs publics. Donner du grain à moudre à la Faculté qui a toujours eu dans son viseur ces drôles de "médecins". Qui bien souvent ne le sont pas. Un psychiatre est diplômé de la faculté de médecine. Un psychanalyste, pas obligatoirement. D’où la dérive sémantique facile vers le "charlatanisme".


La psychanalyse est donc bien à un tournant. Un virage qui doit être pris à la corde. Pour repartir sur les bons rails. Faute de quoi elle se refermera sur elle-même. Et ce n’est pas le livre de Michel Onfray qui l’aidera à se débarrasser de ses casseroles. 


Car la psychanalyse repose avant tout sur un mode de penser topologique. Lequel s’exerce aussi dans son rapport à la cité. En effet, le rapport de la psychanalyse dans la cité s’inscrit sur la même surface moebienne que celui de la cité dans la psychanalyse. C’est pourquoi un péril pour la psychanalyse en est un pour la société. C’est aussi pourquoi des psychanalystes doivent aujourd’hui prendre publiquement la parole pour manifester. 


Le grand public ignore l’état des lieux de la psychanalyse. D’autant qu’il est déformé par les médias. Sans parler des politiques. L’article 52 de la loi du 9 août 2004 qui réglemente l’usage du titre de psychanalyse peut se lire comme un cheval de Troie. Une manière perverse de contrôler ce qui se passe dans les cabinets. En imposant la logique des évaluations.
Ce livre remet les pendules à l’heure. Un acte citoyen.


Annabelle Hautecontre


Sophie Aouillé, Pierre Bruno, Franck Chaumon, Guy Lérès, Michel Plon, Erik Porge, Manifeste pour la psychanalyse, La fabrique éditions, septembre 2010, 158 p. - 14,00 €    

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