Soline Roux, De l’ombre à la lumière

Dans l’œuvre de Soline Roux l’émotion est toujours diffractée et dégagée même dans les nus d’un érotisme discret. Tout est de l’ordre de l’éther. La photographe fait éprouver le chant des formes dans un hymen du corps, de la nature et une certaine idée de la transcendance.
C’est pourquoi le retentissement affectif passe par un processus dont l'imagerie libidinale est absente, évacuée.

Son seul traitement ne peut être que l’assomption dans un théâtre où les femmes sont nimbées d'incertitude jusque parfois à devenir des anges dans une lumière proche d’un crépuscule. Les modèles témoignent d’une vérité qui est moins d’incarnation que d’appartenance à un autre état.
Ce qui est montré demeure de l’ordre de l'énigme au coefficient de probabilité peu sûr.

Néanmoins les femmes ne sont pas en mal d'identité et d'existence mais la présence demeure souvent en suspens et rappelle un passage du solo de Beckett "c'était ça quelque chose comme ça venu parti venu parti personne venu personne parti à peine à peine venu parti à peine venu parti".

Les éléments diégétiques ne sont là que lorsqu’ils font un avec les corps.
Tout ce qui se passe possède une rigueur tranquille : pas de solennité emphatique. Juste quelques poses de mouvements en cours. Et si le corps féminin semble l'objet d'un culte il est moins le signe d’un rite orgiaque que celui d’un cérémonial serein aux images ineffables : surgit la vérité d'un monde plus cosmique que terrestre qui se dégage du chaos.

L’artiste ne prétend pas éclairer un mystère mais l'image déploie une rythmique étrange : à la force des voluptés se substitue une sensorialité et habitée où la nudité est plus dénuement que suggestion corpusculaire. La fonction théâtrale de la photographie ne consiste plus à montrer en quoi consiste le fait d'être là. Elle appelle une vision spectrale dans une lumière parfois nette parfois modus moriendi et blafarde afin qu'un irreprésentable puisse apparaître. Le monde court à l'absence.
Par pudeur les femmes semblent s’effacer pour laisser place aux anges.

Jean-Paul Gavard-Perret


Soline Roux, De l’ombre à la lumière, Kisskissbankbank.com

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