Stétié & Alechinsky : Espaces physiques, espaces mentaux

Stétié par sa poésie et comme toujours fait du roman de l’être un livre de l’oubli et de mémoire qu’Alechinsky souligne de ses traits. Les deux créateurs plongent le passé au présent et le présent au passé. Les temps trouvent ainsi un équilibre et cette balance est peut-être le mouvement premier du sens. L’oubli n’est donc pas une perte mais une mémoire seconde. Ecrire représente l’action de jongler avec ces deux postulations.

Détaché des formes classiques le texte est visible à la manière dont se lisent les dessins qui l’accompagnent. Ils pénètrent l’espace et le temps pour faire comprendre que tout va finir et que la fin détermine notre existence tout en ouvrant une plénitude. Elle  n’est pas une échappée mais l’entrée dans la matière même du jour.

 

Alechinsky  amène par sa couleur un autre fond à cette postulation comme en musique un nouvel instrument amène un nouveau ton à un orchestre. Sur l’étendue neigeuse de chaque page le lecteur n’a plus à ramasser seulement les taches noires des mots. Un horizon s’élargit réunissant ce qui a été oublié et ce qui sera oublié. Chacun de nous porte cette ressemblance au fond des yeux devenus - grâce à l’artiste - bleus.

 

Jean Paul Gavard-Perret

 

Salah Stétié / Pierre Alechinsky, L’ Uræus, Fata Morgana, mars 2014, 32 pages, 12 euros

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