Critiquée et déformée, étudiée et respectée, l’histoire ne cesse de nous suivre et de nous proposer de multiples enseignements. L’art est un des domaines où ceux qui nous ont précédés le prouvent.
S’agissant des deux empires qui ont marqué la France au XIXème siècle, celui de Napoléon 1er et celui de son neveu Napoléon III, le rôle majeur des arts, que ce soit la peinture, le mobilier, l’architecture, la sculpture, la tapisserie, les arts décoratifs jusqu’aux miniatures et aux merveilleuses productions des manufactures, s’y manifeste de façon éclatante.

Répondant aux fastes des deux gestes napoléoniennes, d’abord au service du pouvoir mais ouvrant en parallèle sur un développement de l’artisanat et de l’industrie sans précédent, les arts donnent aux deux souverains et à leur politique, en France comme à l’étranger, une magnificence et un faste qui atteignent en qualité, raffinement, beauté, originalité, ceux qui dans les siècles précédents ont tout autant participé à la grandeur des règnes des rois. Les abeilles et aigles remplacent sans déroger à la grandeur nécessaire les fleurs de lys !

La continuité n’exclut pas les évolutions et si par exemple Napoléon III suit les pas de son illustre oncle, il donne aux artistes de son temps une impulsion résolument inédite, avec un retour aux lignes plus classiques, très ornementées, ainsi que cela se note en ébénisterie. Il veille notamment à accroitre la diffusion des œuvres par le biais des Salons et des musées.
C’est à Napoléon III que l’on doit la création du musée des Antiquités nationales, installé au château de Saint-Germain-en-Laye.

Pour la première fois sont confrontées, en prenant appui sur un ensemble de pièces toutes absolument magnifiques, pour certaines jamais encore exposées, les politiques artistiques des deux empereurs. Une telle mise en miroir n’a à ce point de précision et d’étendue jamais été faite.
On voit combien chacun, tout en ayant le même souci de grandeur et d’assise de leur règne, avance dans la même ligne de promotion de leur autorité et de leur savoir, donne sa propre empreinte au style de son époque, mêle le classicisme aux lignes héritées de la Rome impériale et associe les motifs découverts lors de la campagne d’Egypte à ceux qui annoncent le romantisme.

Dans les deux cas, à des rangs différents, "la légende n’est pas très éloigné de la réalité".
Gros, Ingres, David, Houdon, Percier et Fontaine, Gérard, Vivant Denon appelé l’œil de Napoléon pour l’un, Carpeaux, Meissonier, Flandrin, Winterhalter pour l’autre, sans oublier les grands serviteurs comme Alexandre Brongniart, directeur de la Manufacture de Sèvres et  Emilien de Nieuwerkerke, intendant des Beaux-Arts de la Maison de l’empereur, également sculpteur, et proche de Napoléon III.

A plus d’un titre, tous créent un univers particulier pour ces mécènes éclairés et entreprenants. Les goûts s’expriment aussi bien dans un déjeuner en porcelaine dure de Sèvres avec des vues délicates sur les environs que dans une tabatière avec décor végétal et rinceaux exécutée par l’orfèvre-joaillier Maurice Mayer (1797-1875).
Les Maisons respectives constituaient des acteurs essentiels et favorisaient ainsi l’éclosion des talents.

Au total, plus de 200 œuvres, traitant au fil des salles des portraits officiels, du sacre, des victoires, des commandes, des fêtes, des lieux emblématiques comme La Malmaison ou Compiègne, sont proposées et permettent de mesurer à quel degré d’apparat ces deux régimes sont parvenus. Elles montrent combien l’art aura été un moyen privilégié pour faire rayonner la France.
Une visite parfaitement guidée par les profils des deux empereurs, donnant un repère visuel indispensable aux objets et tableaux présentés. 

Dominique Vergnon

Pierre Branda et Xavier Mauduit, L’art au service du pouvoir, Napoléon 1er - Napoléon III, 21X27 cm, illustrations, éditions Perrin, avril 2108, 189 p.-, 23 euros.

A voir à l'atelier Grognard, 6 avenue du Château de Malmaison, 92500 Rueil-Malmaison, jusqu'au 9 juillet 2018