Après la publication de CosmoZ en 2010, un long poème en prose envoûtant, Actes Sud reprend en poche un ouvrage paru en 2008 chez Gallimard. Ne le cherchez donc pas en Folio. Le monde de l’édition possède parfois de drôles de règles... Claro explore derechef sa veine surréaliste. Et démontre que le roman ne respecte aucune règle. Sauf la sienne. Chapitres en ordre décroissant. Mise en page libre de toute métrique. Jeux de mots. Situations absurdes. Tout y passe du moment que cela peut servir l’histoire. Le texte. La littérature... 

Puisque le voilà plaqué, le narrateur s’enferme dans ses chimères. Estée lui apparaît à tous les coins de rue. Il s’enferme avec son livre préféré, Madame Bovary. Mais n’est pas Flaubert qui veut. Délires et projections vont l’emmener derrière le miroir. A son tour protagoniste, il vivra une autre manière de. Histoire de réécrire le chef-d’œuvre qui lui tient lieu de livre de chevet. Et plutôt que des antidépresseurs, il tentera d’aller se loger dans l’esprit de l’écrivain. Voire des personnages. Mais lequel choisir ? Qui devenir pour que son chagrin cesse ? 

Car Estée ose paraître encore et toujours. Même dans le roman. Il habitera toutes les formes de réincarnation, de la puce au pied-bot pour se jouer du sort qui s’acharne.

Avec une virtuosité sans faille et une grande inspiration, Claro a taillé l’une des plus belles pierres de l’édifice. Reflet génial d’un sentiment unique. Puisque tout lecteur de Flaubert garde en lui, à vie, une image particulière. Que l’on retrouve ici avec ce sentiment de nostalgie. Cette fleur jaune qui mordille l’estomac. Un délire amer. Mais un délice tout de même.

Annabelle Hautecontre

Claro, Madman Bovary, coll. "Babel", Actes-Sud, avril 2011, 196 p. - 7,50 €