"Noël au chaud", Tatie danielle en provence

Où l’
on découvre que la vieillesse n’est pas si paisible

Provence, fin des années 70 : Raymonde, 76 ans, vit seule dans sa maison. Veuve, elle n’a pas d’enfant (en fait son seul fils est décédé très jeune). Sa maison fait l’objet de la convoitise du maire qui désire acquérir le terrain pour faire construire un lotissement. La vieille refuse et s’accroche à sa maison, résiste à la douce pression de l’assistante sociale, du notaire, de l’ensemble du village.

Jalouse, plutôt amère, Raymonde se met à regarder autour d’elle. Ce qu’il lui faut c’est une famille, celle de sa voisine Augusta par exemple, entourée de l’affection de son fils.  Raymonde est envieuse d’Augusta et décide de faire courir le bruit qu’elle est prête à louer une partie de sa maison : elle espère ainsi attirer le fils en question, au chômage et qui rêve de monter un garage. Grande manipulatrice, elle essaie d’attirer aussi la petite fille d’Augusta. Cette dernière voit clair dans son jeu et lui fait savoir qu’elle vivante, jamais son fils ne louera cette maison. Raymonde comprend que sa vieille amie est un obstacle à son rêve. Et un engrenage meurtrier se met en branle.

La surprise d’Arnaud

Auteur prolifique, G.J. Arnaud, héraut de la littérature de gare, est plus connu pour son cycle de la compagnie des glaces. On n’avait pas gardé le souvenir de son goût pour le polar. Soyons clair, Noël au chaud est un livre déplaisant, et il semble bien que tel ait été le souhait de son auteur. Déplaisant car dérangeant : on voit ici une vieille dame se découvrir une passion et du talent pour le meurtre. Son machiavélisme digne d’un « jeune » tueur en série fait froid dans le dos. Et pourquoi tue-t-elle ? Parce qu’elle est seule, sans attaches, sans amis. Sa solitude affective la pousse vers le crime afin d’acquérir ce qui lui manque le plus (et que la vie lui a refusé) : une famille. Si notre tatie Danielle déteste les enfants, c’est certainement parce qu’elle jalouse ceux qui en ont eu. On peut voir dans Noël au chaud une méditation tragique et désabusée sur la condition du 3e âge. Raymonde ne veut ni aller dans une maison de retraite, ni dans un hospice. Elle veut sa famille, qu’elle n’a pas pu avoir et la société ne lui propose aucune issue susceptible de répondre à son désarroi qui, combiné à son amertume, l’amène à sombrer dans la folie meurtrière.

Le portrait psychologique dressé par G.J. Arnaud touche juste. On peut donc saluer cette réédition d’un roman noir bâti sur un problème toujours contemporain. N’est-ce pas finalement le propre de la littérature policière ?

Sylvain Bonnet

G.J Arnaud, Noël au chaud, Plon, "rétro polar", novembre 2010, 220 pages, 9 €

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