"La guerre olympique", sport massacre


Bloc contre bloc


Sorti en 1980 au moment des jeux olympiques de Moscou - marqués par le boycott américain après l’invasion de l’Afghanistan -, la Guerre olympique est une habile anticipation d’un monde où l’antagonisme entre les deux blocs s’exprime uniquement à travers le sport. Avec des conséquences macabres toutefois : en cas de défaite d’un camp, une partie de la population - généralement des détenus de droit commun ou des prisonniers politiques -, est éliminée - habile manière de réguler la démographie tout en offrant au peuple du pain et des jeux pour préserver les systèmes de chaque côté du mur. Pelot, d’ailleurs, estime que les deux camps, libéral et communiste, sont comme deux frères siamois, unis dans le désir de garder leurs peuples soumis, et la guerre olympique est un bon moyen, par le spectacle et les émotions proposés, de les maintenir dans un état léthargique. Et d’éviter toute révolte.

Si l’anticipation politique a pris un coup de vieux avec la chute du mur - même si le sport est devenu un enjeu politique encore plus important pour les États, comme la Chine l’a montré lors des JO qu’elle a organisés en 2008 -, tout ce qui concerne la critique du sport spectacle touche encore juste.

 

Du sport jusqu’à la mort


2222 :début de la nouvelle guerre olympique. Blancs contre rouges, comme à l’accoutumée. L’équipe rouge mène jusqu’à ce que Pietro Coggio gagne l’épreuve de boxe. Coggio est un champion d’un nouveau type : il est le résultat de manipulations génétiques et a été entraîné dès l’enfance pour devenir un champion. Enlevé à ses parents, il est élevé par ses entraîneurs. Doté du psychisme d’un enfant, il est amoureux fou de Virginia, une des nombreuses groupies qui tournent autour des champions des deux blocs. Dopé aux hormones, Coggio n’existe que pour gagner, quel qu’en soit le prix. Dans ce portrait outré et volontiers caricatural, on finit par reconnaître certains des grands sportifs d’aujourd’hui (pensons aux footballeurs français par exemple).

De ce point de vue, c’est la force involontaire de ce roman mineur de Pierre Pelot - qui ne traite pourtant pas directement des questions liées à l’image, au culte de la performance et des canons de la beauté imposés à travers les sportifs -, trente ans après sa première parution, de sonner encore actuel.

 

« C’est toi le plus fort, Coggio.

C’est toi le meilleur, petit.

C’est toi le Héros des Héros.

Trente mètres… Vingt…

Dix mètres.

Et voilà, petit. Le supplice est fini. »

 

Sylvain Bonnet


Pierre Pelot, La Guerre olympique, Gallimard, Folio SF, 352 pages, Avril 2012, 6,95 €

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