Jean-Claude Leroy : Toutes tuées / Poèmes à crier

 

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Jean-Claude Leroy a écrit une quinzaine de livres, des poèmes et des récits, ces derniers publiés aux éditions Cénomane. Il a participé activement aux activités de l’excellente maison d’édition « L’Éther Vague », hélas aujourd’hui disparue. Il a aussi animé une très intéressante revue, « Tiens », qu’il qualifiait avec humour de « Revue locale d’expression universelle » et dont la caractéristique était de se transmettre de la main à la main, comme son nom l’indique. Les activités de cette revue se poursuivent aujourd’hui sous une autre forme sur son site : « Tiens, etc ».

Il vient de publier un deuxième recueil de poèmes aux éditions Rougerie : « Toutes tuées ». À lui seul le titre est d’une rare violence et, d’une certaine façon, nous prévient qu’on ne sortira pas indemne d’une telle lecture. Mais de quoi s’agit-il ? Ce que l’auteur pose d’emblée, c’est le sort réservé à la femme en tous lieux et à toutes les époques, la femme à la parole qu’on étouffe, la femme condamnée à être « prise », la femme qui prend pour être « prise ». À mots couverts, l’enjeu est celui de la mise au monde, du cycle de la naissance et de la mort, et en cela je ne peux m’empêcher de penser qu’il y a quelque chose de « bouddhique » dans ce livre, à la manière bien sûr de Jean-Claude Leroy : le dérisoire d’être au monde qui prend chez cet auteur des allures de désespoir et de révolte.

Dire cela ne rend cependant pas compte de l’écriture de Jean-Claude Leroy. Ses poèmes sont jetés sur la page pour être lus à haute voix, pour être criés à la face du monde. Le mieux est d’en citer quelques extraits :

 

«et nous que faisons-nous ici ?

– je-tu-il demande –

à ne pas prendre nos claques

à ne pas déguerpir à cheval

à ne pas entrer par l’intérieur dans le vif

à ne pas expérimenter,

transpirer d’être

il se peut que

je n’apprenne jamais rien

que je joue à ne pas apprendre

par peur d’en être

– être quoi ?

ne soyons pourtant pas coupés à ce point, dis-je

par peur d’être un peu découpé

la société n’est reliée à rien (à personne) elle est un

     tout

ne sois pas coupé ni pour ni par cette garce

brasse plutôt l’espace et le temps ramassé déployé

     élastique

le temps déplacé hors du temps

ton corps les relie l’un à l’autre

il sait quelque chose il a vécu la grande fatigue

la transpirante enivrée mal barrée dans le passage

là même où tu expiras enfin pour commencer »

 

 

                                                                Alain Roussel

 


-« Toutes tuées », de Jean-Claude Leroy, aux éditions Rougerie

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