Lucienne Desnoues : quelques citations

Numérisation_20200723

En ces temps de manifeste magistrale confusion entre création et simple créativité où le premier couillon venu peut même délibérément se déclarer – ou bien être proclamé... – artiste puis, fort de cette simili identité, être ensuite facilement reconnu tel par un public autant docile que déjà déboussolé en produisant le plus souvent tout et n'importe quoi pour, avant tout, vite alimenter son commerce, il me semble bon et opportun de donner à entendre quelques rigoureux "rappels" venant de la part de la chère Lucienne Desnoues.
Y mêlant pour son compte art de vivre et art poétique, ce grand caractère fait preuve en ces propos d'une belle, large, aujourd'hui rare, lucidité.
Qu'on en juge :

Le langage me paraît être la plus stupéfiante création de l'homme. La poésie, c'est la fête du langage. Une fête où chacun reste dans son coin tourne au désastre. Voilà ce qui me semble arriver chez les muses, depuis qu'il est de rigueur de s'y travestir en sphinx.

L'amitié nous devient de plus en plus précieuse, nous apparaît de plus en plus comme la merveille des merveilles. La qualité humaine, dans les déliquescences et les cruautés actuelles, prend un éclat divin.                                                                                                   

Contrairement à cette avant-garde qui ne se veut la fille de personne et fait avec ingratitude débuter la poésie ou la peinture à ses propres travaux, j’aime surprendre chez les grands artistes les traces de l’hérédité.

Je veux bien m'user aux saisons.

L'époque devient de plus en plus folle. Cela de temps en temps nous déboussole mais le plus souvent nous affermit dans nos convictions essentielles. Soyons bien vrais, soyons bien chauds, bien attentifs à tout, bien pudiques, ayons le plus d'amour, le plus de vertus et le plus de style possible.

J'ai besoin d'agir matériellement pour que mon esprit devienne volubile et pour que tous les petits clapets intérieurs qu'il est nécessaire d'ouvrir pour avoir accès à soi-même, et au meilleur et au plus riche de soi-même, veuillent bien s'ouvrir.

Le quotidien est plein de sacré.

Mon ouvrage le plus absorbant est de façonner le quotidien, le temporel de toute une famille, et ma pente de poète m'a conduite à tenter d'étendre cet ouvrage au permanent et à l'intemporel.

Je suis incapable de m'attabler pour écrire un poème, de décider que je consacrerai telle heure à la poésie. Si j'essaie, je m'égare, je me dépayse en moi-même et je me trouve bientôt désespérée au milieu d'un désert.
J'ai besoin de mener de front œuvre ménagère et travail intérieur. Et j'ai besoin qu'un paysage m'encourage, m'approuve, soit mon complice et mon animal familier.

Les fables d’Étalon Naïf


André Lombard

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