Daniel Ziv et les totalitarismes

Daniel Ziv a été confronté à trois cataclysmes de l’Histoire : les horreurs nazies, staliniennes et maoïstes. Toute son œuvre reste une lutte contre le pouvoir dissolvant de la mort que les idéologies totalitaires du XXe siècle ont inventée. Si le nazisme semble plus important que les deux autres : les trois se valent. Le seul avantage (sic) des marxistes étaient qu’ils avancèrent plus masqués. L'idéologie soviétique fut largement antisémite. Certains survivants découvrent parfois encore aujourd’hui que leurs familles ne furent pas exterminées par les nazis : d’autres avant avaient anticipé les purges hitlériennes.

Daniel Ziv fouille les arcanes des cages de l’Histoire. Il témoigne pour espérer la survivance de l’humanité. Poétique (Poèmes du vide) ou informative (Une vie Livre I Les années soviétiques) l’œuvre avance dans la noirceur en cherchant le soleil et la chaleur pour récuser les tueurs qui fomentèrent l’impensable. Mais l’auteur est lucide : "Vous bâtissez l’amour / dans les charpentes du futur / tangibles, presque réelles / et pourtant le futur / est toujours pour plus tard."
Car "le sang s’est étoilé".

L’auteur ramène au cœur du pire : dans les camps de la mort puis dans la traversée de l’URSS et de la Chine. Une telle recherche connaît l’emprise des sangs lointains. Son acte créateur crée des branches nouvelles au réel dans la vibration des images ouvertes. La croissance du monde a lieu.
Car Daniel Ziv écrit pour non seulement dénoncer mais combattre le chaos. Sinon pour la survie du moins pour la mémoire des disparus. Poèmes du vide devient la parabole du vivre par le rappelle des exécutions, des vagues d’un océan sans rivage, d’une terre sans bord et pleine de gouffres.

Et l’auteur n’oublie jamais les terres noires où ont été exterminés les siens par divers assassins. Cette terre a fini par de recouvrir les charniers à ciel ouvert. Ils ont essaimés sous d’autres latitudes. Pour le dire, l’écriture vient du souffle collectif, elle se veut résistance aux effacements programmés. Elle évoque des mains sans existence, des pieds sans empreintes, des poussières animées dans le vortex de l’histoire.

Tout rappelle les tourments de l’auteur comme le fit Celan et dans l’espoir que les nouveaux Mikhaël et Nadia, Galia comme Klara, Jakob, Ozjasz, Hema, Samuel, survivants ou enfants de deuxième et aujourd'hui troisième génération ne vivent plus seulement dans l'angoisse à corps perdus dans les forêts d’Ukraine ou ailleurs là où le soleil ne pénètre plus : il y fait froid même en été. Tandis que des stèles en contrebas veillent sur les morts qui furent parfois exhumés

 

Jean-Paul Gavard-Perret

 

Daniel Ziv, Poèmes du vide, Les Nans, Z4 Editions, 12 euros

Daniel et Galia Ziv et Mikhael et Nadia Gourevitch (idem).

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