La peinture est son double : Christine Célarier

Christine Célarier est une écrivaine attachante. Elle rend palpable un monde macrocosmique par un effet de sidération. Par ses textes le lecteur devient voyeur saisi par un mixage d’envoûtement, d’attraction, de désir et d’interdit. L’auteure joue en effet sur l’aspect votif de ses créations. L’inconscient n’y butte pas forcément : il sent qu’il est soumis à une attraction diffuse.

Car si l'auteur décide et tranche de ce qui en est des images elle ne castre rien. Elle creuse mais exhausse, érige aussi. Tout devient objet de mutation. Pour Christine Célarier l’art et ce qu'elle en dit s’apparentent une perte de contrôle. En ce sens il est comme le sexe. Du moins comme l’entend un de ses modèle, Louise Bourgeois : "Chez une femme le sexe apparaît au moment où elle perd le contrôle, chez l’homme il intervient comme affirmation de son contrôle".
Dans le travail de Christine Célarier la perte domine afin qu’une liberté de création existe et dérive dans de tendres girons : "Des visages de madones à la carnation lumineuse se glissent vers sa joue gauche et la caressent avec une grâce infinie."

Le monde des chimères impose un jeu de mémoire. Affectueuses et ouatées elles font de ces deux textes des créations dévorées, dévorantes afin d’offrir de l’essentiel. L'auteure se délie tout autant des purs effets de réel ou de décor, que de ceux de la spiritualité et de la sensualité en rase motte. Tout perd un solidité d’apparence. Le dehors et le dedans, le réel et l'image deviennent des notions qui ne fonctionnent plus tant il y a des altérations de surface. Si la réalité perd sa substance, le langage y gagne au moment où pourtant ses déterminations et sa validité oscillent, où il se perd en richesses d’apparat et n'est qu'incertitude.

Jean-Paul Gavard-Perret

Christine Célarier, Sans Lagunaires, Derrière la Salle de Bains, Rouen, 2019

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