Virginie Jaton contre le silence

Une forme de déshérence – inhérente aux textes de Virginie Jaton comme aux peintures de Claire Nicole – crée des jambages et des soubresauts contre les ombres. Il ne s’agit plus de se dresser contre elles mais de leur faire corps. En une suite de sensations métaphoriques, le peu revient sans cran de sûreté dans un bleu de nuit.

La voix qui se rapproche, s’écoute au milieu des éléments figuraux que Claire Nicole déplace. Virginie Jaton rappelle de la manière la plus poétique que nous ne sommes pas que des âmes. Nous ressemblons aussi à des arbres. Lorsqu’ils sont coupés de leurs racines leur langage devient mensonge. Il tronque et démembre C'est pourquoi la tentation du silence saisit parfois.

Mais ce serait là accepter de ne pas avoir de véritable existence. Contre une telle extinction de voix il faut se battre. Virginie Jaton s’y soumet pour répondre au double problème de l’identité. À savoir le qui je suis et le si je suis.
Sa poésie permet de connaître les propriétés physiques du feu des êtres de bois et d’en faire éprouver la chaleur, la brûlure comme la cendre.

L’auteur laisse sa langue (qui, elle, n’est pas de bois) parler bien au delà de la seule volonté consciente. S'inscrit une avancée subtile en une économie particulière : à un texte succède un autre texte dans un mouvement de volute. Palpite une chair que l'on ne connaît pas ou trop mal. Il faut aller chercher chaque fois un peu plus loin dans les mots. Nous nous y aventurons sans crainte car l'auteure a biffé ceux qui immobilisent.

 

Jean-Paul Gavard-Perret

 

Virginie Jaton & Claire Nicole, Sur le bruit d'une branche, éditions Couleurs d’Encre, Lausanne, 2019

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