Fouad El Etr : quand le silence parle

"Indicible silence" comme "Là où fini ton corps" reste à des textes majeurs. L’effort dit poétique est de retour vers l'impossible qui est paradoxalement la condition de la possibilité  du poème même si chacun d'entre eux possède sa nécessaire "défaillance".
Dire est toujours "mal dire" comme écrivait Beckett mais pour dire mieux. 

C'est pourquoi les re-présentations stabilisées des femmes aimées détruisent un classicisme de l'évocation  afin que fasse pression l’innommable du réel ou de l’expérience amoureuse pour excéder les approches acquises  par une régénération formelle faite de mots et de formulations simples mais où chaque mot est pesé pour montrer ce qui se passe :
Quand tu déplies
Jusqu'aux étoiles
Tes jambes
Et me dissous
Dans ta beauté acide
Foie reins cœur moelle
.

Manière d'exprimer "ce qui commence là où le sens s’arrête" (Lacan). est vouée en trouvant des équivalents formels à l’irruption de l’innommable qui passe ici par une aventure poétique conséquente. 

Fouad El Etr ne se soustrait pas à une telle sommation. Il ne veut et peut  vouer  son travail à l’insignifiance et à l’obsolescence. D’étape en étape il mène de front la quête des solutions formelles de poèmes découpés et mis en tension quitte à ce qu'ils se détruisent l'un l'autre dans néanmoins la puissance positive d'un exercice de "change".
 

Jean-Paul Gavard-Perret

Fouad El Etr, Là où finit ton corps, La Délirante, décembre 1982n 48 p.-, feuilles non paginées, sous couverture en vélin d’Arches rempliée à trois côtés, ornée d’un bois gravé par Henri Renaud d’après un dessin de Sam Szafran qui avait servi de couverture au premier numéro de la revue La Délirante, sous emboîtage cartonné de papier vert et étui rigide recouvert de papier Canson vert océan

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