Manuscrit MS 408, Thierry Maugenest prend à son compte le légendaire manuscrit Woynich

Utilisant à son profit les inconnues multiples qui entourent encore aujourd'hui de mystère le manuscrit du XIIIe siècle rédigé par un moine anglais (Roger Bacon, érudit s'il en fut) et connu sous son nom actuel de ms 408 ou manuscrit Voynich du nom de son dernier propriétaire, le plus étonnant document codé et toujours non décodé à ce jour (1), Thierry Maugesnet se lance dans une aventure qui mêle enquête policière et guerre des services secrets pour la lecture des secrets de ce texte. Quelle finalité ? Sans doute dominer le monde en en connaissant le secret, quelque chose entre le graal et la symbolique céleste. Mais au terme de son enquête parmi les bibliophiles et en parallèle d'une société secrète, gardienne du code, après quelques morts, quelques doutes sur l'existence même du code de lecture, tout se termine par un question de principe lors d'un show télévangélique :

«  [...] vaut-il mieux  connaître la vérité et perdre l'esprit ou vivre dans l'ignorance afin de préserver notre bonheur, même si celui-ci est illusoire ? »

Thierry Maugenest, pour en finir avec son récit et les petites aventures de son agent spécial Marcus Calleron, fort sympathique mais un peu vite brossé, conclut à l'admirable beati pauperes spiritu et on s'arrête là, comme s'il nous disait « ce n'était qu'un rêve », laisse le mystère entier à d'autres, on voit de loin qu'il se passe quelque chose mais surtout on ne s'approche pas. C'est dommage...

« [...] la véritable sagesse voudrait que ni vous ni moi ne cherchions à connaître le sens de ce qui est écrit dans ce livre. »

On peut regretter le manque de souffle et, peut-être, la précipitation avec laquelle Maugenest termine son histoire, dont l'ampleur lui échappe sans doute en en faisant une manière de Tintin et les sept boules de cristal un peu vite bouclée sur une fin new age très bons sentiments hollywoodiens. Il y avait là matière autre chose qu'une brève histoire, il y avait des codes secrets et des sociétés savantes à développer de façon crédible, il y avait à mettre en place une structure bibliophilique convaincante. Mais tout trop proche de la Neuvième Porte de Roman Polanski (2) pour ce qui est de la construction et de l'enquête (même si les différences sont nombreuses), trop vite montée pour que cela tienne bon. L'écriture de Thierry Maugenest, rapide et entraînante, ne parvient pas à faire passer par son rythme au-dessus des trous qui rendent, pour le coup, son Manuscrit ms 408 un peu creux. Dommage de gâcher un tel sujet.

Loïc Di Stefano

(1) Pour une histoire des tentatives de décoder ce manuscrit, et pour voir ce manuscrit reproduit dans un très bel ouvrage, lire Le Code Voynich, le manuscrit le plus mystérieux du monde, Pierre Barthelemy (éd. Jean-Claude Gawsewitch). Pour un historique de ce manuscrit, on se reportera notamment ICI.

(2) La Neuvième porte, Roman Polanski (1999), avec notamment Johnny Deep et Emmanuelle Seigner.

Thierry Maugenest, Manuscrit, MS 408, Liana Levi, octobre 2005, 178 pages, 14 euros

Sur le même thème

Aucun commentaire pour ce contenu.