Kjell Espmark, "La Haine, l’Oubli" : la lucidité !

En politique, comme bien souvent partout ailleurs désormais, la lucidité est la pire tare que l’homme moderne puisse porter en lui car, dans un monde libéralisé où tous les coups sont permis, voir la réalité telle qu’elle est est une souffrance infinie... Candide parmi ses pairs, Olof Palme, Premier ministre suédois pétris d’humanisme et porteur d’un projet utopique, fut assassiné le 28 février 1986 dans la grande halle de la capitale. On ne sut jamais par qui ni pourquoi ; enfin, on ne fit surtout pas grand-chose pour le savoir...

Si bien que la parution de ce livre fit, au royaume de Suède, l’effet d’une bombe car il s’agit ici du monologue du défunt qui tente d’y voir plus clair et de solder ses derniers comptes. On n’a pas que des amis en politique, mais de là à cristalliser tant de haine, il y a bien un modèle Palme. Sans doute parce qu’il voulut aller trop loin et trop vite dans les réformes, bâtir ce Paradis socialiste qui tua aussi l’esprit d’entreprendre et l’envie d’en découdre car, quoi que vous fassiez, finalement, à la fin du mois, le salaire était presque le même, alors pourquoi s’échiner à faires des heures supplémentaires, à vouloir construire quelque chose ?

Parabole mystérieuse sur le mépris et la rancœur, ce roman diabolique distille vérités et constats sur la réelle nature humaine qui ne laisse rien présager de bien, comme si l’on doutait encore... Il n’y a qu’à regarder autour de nous en ces temps de période électorale pour voir qu’Espmark a bien mis le doigt dans le mille. Reste une langue qui transporte au cœur de la réflexion et propose quelques instantanés poignants, invitant à la réflexion sur des perspectives possibles si tant est qu’un peu de sagesse vienne habiter les hommes de bonne volonté... Mais y en a-t-il en politique qui soient honnêtes et compétents ?


"Mon abattement fut si effrayant qu’on m’a conseillé de chercher de l’aide. Comme s’il pouvait y avoir un remède à la lucidité."


François Xavier


Kjell Espmark, La Haine, l’Oubli, traduit du suédois par Guy de Faramond, Michel de Maule, novembre 2011, 130 p. - 18,00 €

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