Gérard Picaud et Jean Foisselon, "Sacrées soieries, étoffes précieuses à la Visitation"

Étoffes de foi


Du fait de sa vocation, par la nature même de sa fonction au sein de la communauté catholique, placé à part de l’assemblée, le célébrant lors de la messe revêt la chasuble, un des vêtements liturgiques qui autorise les ornementations les plus belles et les plus variées. Motifs sacrés que la soie enrichit par la délicatesse de ses fils, décorations florales mêlant l’épi de blé à la feuille de vigne, la palme à la rose, entrelacs entourant la croix, broderies d’or dessinant un heureux cortège d’anges et de séraphins, autant de références évangéliques que les taffetas, les satins, les damas, les brocarts et les velours mettent en relief. Tous ces messages constituent parmi d’autres les éléments qui participent au « signe » visible que ce vêtement a représenté  « dès l’époque paléochrétienne ». Car « la matière tissée et son mode de tissage marquent et induisent l’usage que l’on fait des différentes pièces du vestiaire» utilisé par le clergé.

 

À côté de la chasuble, tout aussi riches en symbolique et en qualité textile, notons le pluvial, la dalmatique, la mozette, l’étole qui participent à cette visibilité sacrée et bénéficient également de superbes décorations. Provenant de grandes familles, ayant servi pour des « robes de mariage, des manteaux de cour ou gilets de gentilhomme », ces tissus ont été transformés par les mains agiles, habiles, patientes et pieuses des Visitandines. Ce sont elles qui ont recueilli ces legs, en ont fait ces atours de foi et sont les gardiennes de ces quatre siècles d’un véritable art manuel d’une exceptionnelle créativité.  

 

Spécialistes de l’art liturgique, historiens, chercheurs, conservateurs ont mis en commun leurs savoirs et leurs passions pour composer cet ouvrage remarquable par l’originalité et la rareté du sujet qu’il aborde. En plus des données purement religieuses, il apporte un éclairage inédit au plan historique dans le domaine du travail des étoffes destinées non seulement à la liturgie mais aussi à la protection des reliques ou des objets rituels. Outre un glossaire et des explications sur les couleurs liturgiques, on notera la part faite à l’Ordre de la Visitation, fondé en 1610 par François de Sales, alors évêque de Genève. Deux cartes précisent l’ampleur incroyable qu’il a prise au cours des ans en Europe et dans les deux Amériques. Les fondations se multiplièrent et essaimèrent. Si beaucoup de monastères ont fermé, il en reste encore de très actifs dont celui de Moulins. Les Sœurs entretiennent une collection unique et superbe qui est présentée au musée de la Visitation de cette ville et dont ce livre constitue en même temps le guide, le complément et la mémoire indispensables.  

 

Dominique Vergnon

 

Gérard Picaud et Jean Foisselon, Sacrées soieries, étoffes précieuses à la Visitation, 314 illustrations, 246 x 280, Somogy - Editions d’art, mai 2012, 312 p. - 42,00 euros 

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