DSK en plein "Chaos brûlant" sous la plume de Stéphane Zagdanski

Plus qu’un roman sur "l’affaire" DSK, Chaos brûlant est plutôt un livre sur la folie. Folie du monde, des gens, de l’argent qui rend fou, des fous qui parlent d’argent.

Le narrateur "Sac d’os" ou "Bones" est interné au Manhattan psychiatrique center et disserte avec ses amis "Karl Max", Franz Kafka " ou "Luc Ifer". Tous, il va sans dire sont atteints à divers degrés.

Sac d’os a pour qualité première de connaître les pensées d’autrui et dort dans la chambre mitoyenne de celle où l’ex directeur du FMI a fait un bref séjour.


En quelques phrases, il analyse DSK, un homme pour qui les désirs sont des ordres, quelqu’un grâce à son bagout s’est toujours sorti des situations les plus difficiles. Un homme enfin qui considère autrui comme les pions des jeux d’échecs qu’il aime tant.

En ajoutant son extrême intelligence et le traumatisme du tremblement de terre dont il réchappa à dix ans à Agadir le portrait selon Sac d’os est presque parfait.


Comme il voit dans les pensées, il a assisté à la scène du Sofitel et c’est du croustillant. En moins de sept minutes DSK ressemble à "un gorille qui essaierait d’éplucher une banane à l’envers quand il tire sur la jupe de la femme de chambre et jouit comme un phacochère". La scène est décousue surréaliste et DSK repart sa petite valise derrière lui "portant le séisme en lui".


L’histoire aurait pu continuer mais non, Sac D’os digresse sur l’économie, Kant, Hitler qui fut le meilleur économiste de l’histoire, l’antisémitisme…durant de longues pages.

Retour à DSK au FMI "au cœur de la crainte du tremblement où il est le plus à l’aise".


Digressions diverses avant la reprise du récit de la comparution au tribunal. Arrivée intempestive de "Chouchou" soit Nicolas Sarkozy et Carlita qui n’ont pas grand chose en commun avec la débâcle de DSK. Colère homérique de Chouchou. Entre deux péroraisons et cinq analyses parfaitement incongrues le narrateur raconte avec un grand brio Rikers Island ou la maison à l’abjecte décoration nouveau riche. Mais de l’essentiel : les rapports entre les deux époux lorsqu’il sort de prison, rien. Sac D’os préfère conter l’invention de Daguerre, le fait qu’Anne Sinclair – hystérique – selon lui ait refusé que Picasso peigne son portrait lorsqu’elle était adolescente.


Revient le thème de l’argent, le mal absolu, sujet d’un nouveau chapitre. Dans un autre le lecteur aura la chance inouïe d’apprendre les 50 mots Inuits pour désigner les diverses nuances de la neige avant d’arriver à la psychiatrie à l’âge nazi ! Quelques rudiments sur le langage Peul assez hilarant et le protagoniste du roman a disparu.


A-t-il d’ailleurs jamais existé dans ce livre brillant, très documenté mais qui rate sa cible. L’auteur prend DSK comme prétexte à la folie du monde en cet été 2011 où tout se mélangea : le sexe, l’argent la vitesse des transmissions : c’est par un tweet que la nouvelle de l’arrestation se propagea, alors pourquoi un fou ne lirait-il pas dans nos pensées ?

La civilisation n’est qu’une mince pellicule au dessus d’un chaos brûlant disait Nietzsche. Stéphane Zagdanski a prouvé que la pellicule était vraiment très fine et l’ennui du lecteur parfois profond.

 

Brigit Bontour

 

Stéphane Zagdanski, Chaos brûlant, Le Seuil, "Cadre rouge", août 2012, 401 pages, 21 €

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