Dans cet ouvrage, Jean Sellier, historien et géographe, s'intéresse à des aspects jusque là considérés comme secondaires des civilisations. Son Histoire des langues et des peuples qui les parlent est un monument encyclopédique qui définit des frontières bien souvent différentes de celles héritées des combats de l'Histoire. Il constate que "les langues sont menacées de la même manière que la biodiversité et pour les mêmes raisons".

Sa vision, étayée de près de 70 cartes du monde entier nous permet, entre autre, de revisiter l'histoire de notre pays. avant la révolution de 1789, le français tel que nous le connaissons actuellement est une langue non maternelle, étrangère pour la moitié au moins des citoyens. Ce n'est qu'avec la Troisième république et les lois Jules Ferry que l' école gratuite et obligatoire impose la langue française telle que nous la pratiquons. Un siècle après, à la fin du vingtième siècle, devant l'invasion de l'anglais, il paraît nécessaire d'inscrire dans la Constitution que "la langue de la République est le français" quitte à enseigner sept ou huit langues régionales et d'outre-mer reconnues aux examens de l'école gratuite et obligatoire.

Le livre de Jean Sellier montre avec divers exemples comme celui-ci que le domaine linguistique est en constante évolution. Après avoir étudié les langues d'avant les écritures, ainsi que celles d'avant l'imprimerie, il marque le tournant de l'époque moderne qui connaît une véritable explosion de créativité linguistique grâce à la diffusion mondiale de textes en toutes langues. Bien sûr, l'anglais est devenu langue internationale mais c'est au prix d'un bouleversement imprévu et cet anglais parlé est une sorte de patois  ou de sabir qui s'invente sans arrêt. 

Chabreuil

Jean Sellier, Une histoire des langues et des peuples qui les parlent, La Découverte, octobre 2019, 712 p.-, 32 €