Salomon de Izarra, "Camisole"

Attractif par la référence à Lovecraft annoncée ainsi qu'au sujet de la thèse universitaire soutenue par l'auteur (l'écriture de l'enfermement), Camisole de Salomon de Izarra se révèle malheureusement être un court roman dont les défauts l'empêchent d'atteindre à son objectif, nous plonger dans la folie claustrale d'un asile devenu personnage principal...

Edgar Griffith est un jeune comptable dont la vie ne vaut guère plus que l'archétype de cette fonction qui semble devoir le définir totalement. Premier choc, le bâtiment est un monstre imposant qui déchire le paysage alentour par sa masse quasi difforme. Second choc, la rencontre avec l'étrange Oswald Barker, directeur du centre, trop précautionneux pour ne pas être porteur de quelque secret. Troisième choc, après un assoupissement, Edgar découvre qu'il est dans le ventre d'un monstre qui vit, qui digère les fous pour en faire ses hommes de main chargés de le tuer mais aussi ses objets au sens strict (des chaises, de l'alcool...). 
Griffith se "réveille" dans un univers devenu fou, pourchassé par une horde sanguinaire qui cherche à le dépecer, puis par un monstre, "M. Rire", géant indestructible au sourire monstrueux et à la hache acérée. Alors il se cache et parcours l'asile de bas en haut pour trouver une échappatoire, et fait en même temps une plongée paradoxale dans ses souvenirs pour atteindre au moment sale d'un acte ignoble de son père qui fonde tout ce qu'il est. 

Plongée dans la folie et introspection, ce n'est pas un duo très original, mais il fonctionne bien et forme pour ainsi dire l'intérêt de ce roman. Toutefois, les défauts de Camisole vont peser plus lourd que cette mince qualité.

Le premier défaut de ce roman est qu'il ne choisit pas. Mélanger les lois du romans gore, du roman fantastique et du roman gothique, prendre ici ou là une référence et la poser sur son histoire ne suffit pas, il manque une cohérence globale et une vraie appropriation, que les références soient suggérées plutôt que montrées, pour être vraiment naturelles et parler plus sincèrement au lecteur. Le second défaut de ce roman, ses faiblesses d'écriture, empêche de passer outre le premier. Quant au troisième défaut, disons le plus  "scolaire", de la fin (encore le non choix et la possibilité de l’échappatoire par le "ce n'était peut-être qu'un rêve"), il termine de gâcher tous les petits moments agréables passés avec ce roman.


Loïc Di Stefano

Salomon de Izarra, Camisole, Rivages, février 2016, 107 pages, 16 eur

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