Robert Goddard s'épanouit dans les secrets de famille avec "le Retour"

Robert Goddard est incontestablement l'écrivain des secrets enfouis et des réminiscences douloureuses. Avec Le Retour, il crée de nouveau un personnage qui va devoir affronter les ombres sinistres que sa famille a voulu effacer mais qui resurgissent soudain et bouleversent tout ce qui a été construit. La beauté paisibles des lieux est-elle la nécropole des secrets de famille ? Avec un art savamment distillé des allers-retours passé-présent, des descriptions de vie et un cadre qui pourrait tout aussi bien être le personnage principal de son roman, Robert Goddard poursuit son exploration de coins obscurs de l'âme humaine, avec la lenteur qui lui est propre. Lenteur qui pourrait rebuter certain, mais qui se révèle, quand on apprend son rythme propre, une marche continue et dense.


Chris Napier renoue avec sa famille à l'occasion du mariage de sa nièce. Tredower House, la propriété familiale, est devenue un hôtel de grand luxe et son ancien propriétaire, le grand-oncle Joshua Carnoweth, reste dans la mémoire de tous comme victime d'un drame passé : il a été assassiné au fait de sa fortune. En pleine rêverie un peu mélancolique dans les jardins du domaine, Chris voit arriver Nicky Lanyon, son ami d'enfance, dont le père a été pendu pour le meurtre de l'oncle Joshua. Devenu une sorte de vagabond, Nicky assure que son père n'était pas coupable, puis se pend. Ainsi le passé resurgit-il...


Pataugeant dans les recoins sombres des secrets d'une famille qui doit sa fortune à cet oncle assassiné, Chris ouvre une enquête personnelle, par amitié pour Nicky aussi bien que pour résoudre des troubles personnels, et "aère" deux générations de mensonges et de crimes consacrés à couvrir la vérité. Quelle vérité ? Quelqu'un d'autre semble vouloir la mettre à jour. Usurpation d'identité, chantage, incendie criminel, assassinat, rien ne sera épargné à la famille par celui qui, comme un vengeur venu du passé, va vouloir faire trembler toute la famille.


Compliqué de quelques intrigues parallèles (l'amour entre son grand-oncle et grand-mère de Nicky, les crises morales de la génération la Seconde Guerre mondiale et la propre "rébellion" de Chris), dans un suspens qui va sans cesse croissant, Robert Goddard distille son drame dans un décor où le calme parfait s'estompe juste le moment de laisser entrevoir l'ombre qui ne cesse de dominer pourtant, comme un "mystère en pleine lumière" selon le mot de Barrès. Son art est dans la minutie, les détails et la peinture de fresques familiales, et ce Retour est une autre preuve de son talent.


Loïc Di Stefano


Robert Goddard, Le Retour, traduit de l'anglais par Elodie Leplat, Sonatines, août 2014, 400 pages, 22 eur

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