Kerwin Spire et la parenthèse américaine de Romain Gary

L'épisode américain qui emporte Roman Gary pendant 4 ans à Los Angeles reste sans doute un des moments clés de l'auteur. Certes nous ne pouvons pas parler d'époque de formation. Elle a eu lieu bien en amont avec en "dessert" la Seconde Guerre Mondiale et la Shoah. Mais dans la cité des Anges Gary va sentir souffler sur lui une liberté qui va lui permettre de se défaire de ses vies antérieures et de se réinventer.

Certes le terme de cet épisode peut sembler un échec mais Spire montre comment l'avion du retour annonce d'autres moments sinon d'autres mœurs et bien des romans. Riche de documents inédits et/ou intimes ce livre donne une dimension originale aux états d'âme de Gary et ouvre sur le contexte d'Hollywood des visions inédites tant sur la politique sur la culture (cinéma en premier).

Ce récit est passionnant de bout en bout. Il l devient une biographie des plus vivantes et circonstanciées sur l'auteur. Mais l'enquête filée prend ici l'aspect d'une fiction, d'un récit. Toutefois, c'est par le désir d'inventer que l'auteur reste au plus près de son sujet.

Kerwin Spire sait que toute biographie est un remodelage et  que sa prétendue à la vérité une farce. Il réussit donc par la fiction à dépasser les prétentions véristes là où toute la vie californienne d'une classe plus qu'aisée s'anime. Il ouvre des coupes sombres dans les réalités politiques, économiques, artistiques et mondaines. 


Gary n'est jamais passif. Contrairement à la légende il s'investit dans son rôle comme dans – entre autres – celui de mari, même si l'amour finit mal non seulement en général mais en particulier. Si bien qu'en tous points ce texte à la fois sobre, documenté et vif reste un des plus beaux "romans" (vrais) de l'année.
 

Jean-Paul Gavard-Perret
 

Kerwin Spire, Monsieur Romain Gary, coll. Blanche, Gallimard, avril 2021, 324 p.-, 20 €
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