Laurent Bettoni, Les larmes de l’assassin : Au-delà du roman noir, un thriller psychologique, pulsatif et musical…

Dans son dernier roman, Les Larmes de l’assassin, Laurent Bettoni, comme à son habitude, transcende les genres et nous entraîne avec une habilité rare entre la littérature dite noire et la littérature dite blanche.

 

Trois couples en perdition, chacun pour des raisons différentes, et étrangers les uns aux autres, vont pourtant finir par entrer en résonance, dans une affaire criminelle impliquant l’assassinat sauvage de quatre jeunes femmes en cinq semaines, dans le nord de Paris.

 

La structure narrative en plans parallèles allie parfaitement le fond à la forme et emprunte résolument au code du polar ou du récit d’action. A un détail près : ce montage, évoquant les films d’Alejandro González Iñárritu tels que 21 Grammes et Amours chiennes, nous sert ici à pénétrer alternativement et de façon répétée l’intimité des trois couples, à comprendre leur fonctionnement, leur dysfonctionnement, au fil des années.

 

La rythmique est savamment orchestrée. Elle semble suivre les pulsations d’un métronome que l’auteur a réglé pour nous jouer sa partition, nous délivrant en un formidable crescendo émotionnel une mélodie envoûtante, lancinante, à l’image de La Gnossienne N°1 d’Erik Satie, omniprésente dans l’histoire, lien ténu entre les différents protagonistes.

 

Entrant progressivement en collision les uns avec les autres, ils ne s’épargnent rien et ne sont pas davantage épargnés par l’auteur, qui prend un malin plaisir, dans tous ses romans, à regarder ses personnages cabossés par la vie se débattre et tenter de s’en sortir avec ce qu’ils ont, avec ce qu’ils sont et qui ils sont, avec leurs qualités et leurs faiblesses, à la fois si magnifiquement et si tristement humaines.

 

Dans ce registre, accordons la mention spéciale à Aurélie, jeune psychiatre tiraillée entre son ambition et sa conscience professionnelle, toutes deux poussées à l’extrême, et qui, dans un monde encore très masculin, sait bien qu’elle doit en faire plus que les hommes… au risque d’aller trop loin. Dans la lutte impitoyable qui l’oppose au commandant de police Vauquier autour d’un patient qu’elle a en charge et dont l’avenir se joue, y aura-t-il un vainqueur ?

 

Cette fiction se situe résolument au-delà du roman noir. Nous sommes à la fois dans un drame et dans un thriller psychologiques aux allures de tragédie grecque, opposant deux institutions, la police et la médecine, à travers une question polémique de société : la maladie mentale est-elle un crime ?

 

Cécilia Dutter

 

Laurent Bettoni, Les Larmes de l’assassin, Marabout, février 2017, 398 pages, 19,90 €

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