Confiance en la vie, car elle est Amour !

Si un roman, abordant un sujet difficile, vous emporte dès le premier chapitre, c’est bien simple : il faut poursuivre sa lecture, coûte que coûte ! À partir d’un thème inquiétant : une jeune femme doit absolument subir une transplantation pulmonaire si elle veut encore vivre, Parme Ceriset a écrit un roman autobiographique particulièrement saisissant. Son personnage principal, Rose, vit dans la terreur de ne plus jamais respirer – d’être à bout de souffle : Je me saisissais enfin, d’un geste devenu presque mécanique, d’une petite bulle de menthe bleue que je laissais glisser sous ma langue pour qu’elle m’inonde de ses vertus salvatrices, en m’offrant l’illusion fugace de mieux respirer, de mieux percevoir le passage de l’air dans mes narines déjà friandes d’extases sensorielles. Extase sensorielle, on ne saurait mieux dire : tout ce roman est placé sous le signe d’une extrême attention aux sens, au plaisir des sens comme chez Colette, et à l’envie de décrire le détail de toutes perceptions, comme chez Gracq.

Bien entendu, la belle Rose va s’épanouir, et devenir entre autres un jeune médecin, qui ne pourra exercer d’ailleurs que quelques années, puisque les traitements qu’elle doit subir provoquent une immunosuppression telle que ses patients la mettraient en danger de mort. Étant des bougies tout près de s’éteindre, les parents et amies de Rose, son petit frère Edmond, ainsi que son fiancé Adrien, se trouvent souvent bien proches de leur fin ; leurs baisers donnent sur la mort comme une fenêtre sur la cour. Le temps passe, les délicieux séjours dans la Drôme s’estompent, le parc de la Tête d’Or devient flou, et puis Rose a trente ans. Elle doit être opérée d’urgence. L’auteure ne nous épargne aucun détail des différentes étapes de l’opération, depuis les drains jusqu’à l’arrivée tant attendue d’un greffon, et bizarrement tous ces protocoles opératoires deviennent intéressants, passionnants même, sous la plume habile de Parme Ceriset. Elle a sûrement la même hyper-perception sensorielle que Rose : quelques douleurs électriques aux doigts liées à la repousse des terminaisons nerveuses.

Il y aurait encore beaucoup à dire sur les myriades de perceptions subtiles que l’auteure convoque, à l’image des ballons multicolores [qui] s’envolèrent les uns après les autres pour aller disperser vers l’horizon leur part d’arc-en-ciel. Comme le disait René Char, "toute la place est pour la beauté". Après l’opération, le monde va parfois redevenir le pays des merveilles… et des désastres aussi, car un homme qui a aimé une femme quand elle était souffrante peut soudain ne plus l’aimer lorsqu’elle est en bonne santé. Un petit chien adoré peut mourir, des êtres que l’on croyait éternels peuvent disparaître. Laissons aux futures lectrices et lecteurs de ce fascinant roman le plaisir de découvrir toutes ces peines et toutes ces allégresses.

On a beaucoup parlé, depuis quelques années, de résilience. Ici, cela va beaucoup plus loin, à l’orée de ce que Giono appelait la Joie. Parme Ceriset nous emmène avec Rose dans un mouvement vivace et puissant, qui paraît dire : confiance en la vie, car elle est Amour !

Bertrand du Chambon

Parme Ceriset, Le Serment de l’espoir. Que la vie souffle encore demain, éd. L’Harmattan, février 2021, 238 p.-, 22,50 €

Sur le même thème

Aucun commentaire pour ce contenu.