Josef Skvorecky, "Une chouette saison" : romantique Bohême

Rarement roman d’apprentissage n’aura été aussi bien entrepris, sans doute qu’il y fallait un peu de cette âme slave si particulière au tchèque, avec un zeste de fantaisie que seule la Bohême porte en elle et distille à ses enfants... Ainsi nous suivrons les aventures de Daniel Smiricky, élève de troisième, qui cède à ses pulsions sentimentales et tombe amoureux de toutes les jolies filles qui croisent sa route, récoltant moqueries de ses camarades et méfiance des damoiselles. Entreprise périlleuse que la sienne, surtout en ces années troublées par la Seconde guerre mondiale et le respect de la tradition catholique : cela va très vite le mener de désillusions en catastrophes. 


N’y aurait que l’intrigue, on aurait un peu l’air d’avoir déjà lu ça quelque part, mais la force d’un roman ne réside-t-elle pas dans la fulgurance du style et l’inventivité de son auteur ? Ici le cocktail est parfaitement dosé : suave comme il convient quand Danny roucoule, relevé quand il met au point ses stratagèmes, pimenté quand les belles se rebiffent, acide aux lendemains des frasques ravagées par le destin...


De la peinture de la narration et la justesse des dialogues découle un bonheur de lecture qui démontre que la Tchécoslovaquie n’a pas que Milan Kundera comme digne représentant de la République des Lettres. Plus connu comme traducteur ou scénariste, Josef Skvorecly (né en 1924 à Nàchod) a aussi une œuvre littéraire de première importance. Irena, Marie, les sœurs Weberovà et toutes les elfes qui peuplent son roman sont autant d’étoiles désormais accrochées au ciel immuable de la littérature. Et l’on ne peut que s’en réjouir !


François Xavier


Josef Skvorecky, Une chouette saison, traduit du tchèque par François Kérel, coll. "Du monde entier", Gallimard, novembre 2011, 329 p. - 23,50 €

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