Emmanuelle Guattari fait revivre "La Petite Borde" avec émotion et délicatesse


Souvenirs d'enfance

Être la fille d'une sommité novatrice de la psychanalyse en France n''est pas forcément de tout repos. Quand en plus ce dernier est Félix Guattari (1930-1992), activiste écologique avant l'heure, philosophe ancré à gauche, compagnon de pensée de Gilles Deleuze, cela n'arrange rien, car c'est un sacré personnage qu'il faut tuer en bon lacanien pour écrire sur le père ! 

Grandir à La Borde, la clinique que Félix Guattari avait hissé en un des hauts lieux de la psychiatrie et de la prise en charge globale et humaine, c'est grandir entouré de la folie humaine. C'est pourtant avec une tendresse incroyable qu'Emmanuelle Guattari revient sur son enfance dans la propriété du Loir-et-Cher, enfance marquée à la fois par la disparition de la mère et la vie collective d'une bande de gamins. Par une succession de petites touches, vingt-et-un petits souvenirs surgissent pour humaniser ce lieu de souffrance et en faire un lieu de vie, avec émotion et délicatesse.

Le texte est d'autant plus fort que, constamment présent, Félix Guattari est absent du livre, comme si sa fille voulait illustrer une de ses phrases restée célèbre : « Il n'y a pas de manque dans l'absence ; l'absence est une présence en moi. »

Si l'objet même du livre est sans doute plus émouvant que le livre lui-même, voir surgir tant d'allégresse et, finalement, d'enfance du vieux château en ruines qui devint le centre si fameux, n'est pas sans toucher le lecteur.

Loïc Di Stefano

Emmanuelle Guattari, La Petite Borde, Mercvre de France, août 2012, 140 pages, 13,50 euros

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