Retour au 101, rue Condorcet, à Clamart, avec Marina Tsvetaeva

Lors d’une lecture distraite d’une notice biographique de la grande poète russe, Marina Tsvetaeva, Simon-Pierre Hamelin s’aperçut qu’elle avait vécu dans la même rue que lui. Il se rua alors sur son téléphone malgré l’heure tardive : seule sa sœur répondit, rue de Buci, au numéro 12. Elle ne partagea pas totalement la joie de son aîné mais reconnut tout de même le clin d’œil du destin quand il lui apprit qu’à son adresse à elle fut domiciliée la revue de l’Union pour le retour dans la patrie, à laquelle participaient Marina et son mari, Sergueï Efron. Sans parler du fiancé de ladite, qui dormait, lui, et donc qui n’apprit aux jeunes gens que plus tard que son oncle avait traduit pour Gallimard une grande partie de l’œuvre de Tsvetaeva. Après cela, quoi de plus normal que depuis son exil marocain Simon-Pierre Hamelin eut l’envie de nous raconter un fragment de cette vie extraordinaire, concentrant en quelques heures tout ce qui pouvait peindre au plus juste le destin d’une femme hors du commun…

 

Ayant choisi la fuite aux côtés des Russes blancs, Marina, son mari et leurs deux enfants échouèrent en France, démunis, perdus, abandonnés par la providence, en proies à l’extrême pauvreté, mais toujours avec ce feu qui la dévorait, cette poésie qui bousculait les priorités et fragmentait la famille. Tout en lui offrant aussi ses plus belles heures de bonheur dans ce gourbi de Clamart, après celui de Meudon ; en attendant le retour dans la mère patrie et les humiliations des Soviets.

 

"[… j]e ne suis bonne à rien qu’aimer ou écrire, ce qui est parfaitement le même verbe. La poésie, savez-vous, a besoin seulement de choses dont personne n’a besoin. C’est l’endroit le plus pauvre de toute la terre. Et cet endroit est sacré […]"

 

Troussé en quelques lignes lumineuses d’épure légèreté, ce petit livre est un hommage en forme de monument, dressé sur l’autel de l’oubli, pour nous rappeler cette déesse qui maniait si bien l’oralité du verbe peint. S’il participe à ce que quelques lecteurs se ruent sur les œuvres de Marina Tsvetaeva, il aura accompli son dessein.


François Xavier

 

Simon-Pierre Hamelin, 101, rue Condorcet Clamart, Éditions de la Différence, mai 2013, 94 p. – 12,00 €

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