Les moitiés de Claire Castillon - Quand un et un ne font pas toujours deux.

Les moitiés. Les tiers ne peut-on s’empêcher de préciser. Il manque définitivement quelque chose à ces deux-là. Incomplets, une part leur fait définitivement défaut. L’enfant qu’ils n’ont pas eu mais pourtant attendu ? Les amis évincés de leur vie de couple mais dont ils rêvent la présence ? Probablement. Et si le mal qui ronge silencieusement leur amour venait d’ailleurs ; de leur liaison exclusivement duale, de la belle-famille prônant incessamment le repos, l’absence résidant cette fois-ci dans l’excès. Également possible.

Jeunes amoureux, Paola et Michel décident de vivre ensemble après un Bac littéraire, dans un studio parisien. Ils emménageraient plus tard dans une belle maison entourés de leur progéniture, évoluant tous les deux dans le milieu de l’art, passant le dimanche dans sa belle-famille à elle, recevant à diner ses collègues à lui. Et tout cela les comblerait. Des envies raisonnables, à portée de main semble-t-il. Mais les projets ne font pas tout, sinon gonfler de regrets la vraie vie.


Claire Castillon dépeint avec acuité l’histoire de ces deux anti-héros qui écorneront leurs rêves à la réalité du couple. A deux mais seuls, amoureux mais libres, les apprentis amoureux s’essaieront à la vie conjugale avec leur belle innocence. Dans ce jeu un rien voyeur, le lecteur verra les amoureux s’aimer, se découvrir, pour mieux se tester. Coupés de toute vie sociale, réfractaires au mariage, les jeunes s’enlisent dans une routine qui flirte avec les maux du XXIème ; fatigue et autre dépression.

Les idées ne manquent pas dans cette belle histoire à l’humour grave ; comme la demande en mariage en plein Petit bac (Lettre V…) ou autant de situations de couple telles les retrouvailles post-journée de travail, l’ami reçu à dîner tel le patron du mari ou encore le moindre coût érigé en dépense mûrement réfléchie, qui prêtent à réfléchir quand on feuillette les pages et à sourire quand on connaît leur âge.


Qui croire finalement ?

La raison incarnée par la mère du narrateur ou leur indéniable complicité et capacité à se passer de tout qui fait croire en eux ? Car c’est là tout le talent de l’auteure ; sitôt la dernière page lue, le suspens s’installe dans l’esprit du lecteur qui hésite entre le recommencement de l’histoire et l’équilibre mérité des amants.


Camille Pelpel


Claire Castillon, Les moitiés, Vogue, 2009, 4,95 €

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