Maurice, Mahmoud et un réveil-matin…

À des auteurs danois tels que Jussi Adler-Olsen nous devons une brillante démonstration du sens de l'intrigue. À Flemming Jensen, une non moins brillante démonstration de leur sens de l'humour.
 
Maurice et Mahmoud est le troisième roman de Flemming Jensen (Imaqua, 2000 ; Le blues du braqueur de banque, 2012), publié chez Gaïa, maison d'édition spécialisée dans la littérature croate et scandinave.
Cet auteur est également célèbre pour ses talents d'humoriste qu'il déploie sur scène, à la radio et à la télévision.
 
Maurice est expert comptable, un rien cynique, un brin désabusé, maniant un humour à froid comme personne.
Mahmoud est son assistant, complètement « geek », musulman pratiquant soumis au potentat maternel et passablement romantique.
Le premier, dans la tourmente d'un divorce perlant de reproches bilatéraux, se retrouve hébergé chez le second.
Il faudra l'intervention d'un réveil matin destiné à répandre, cinq fois par jour, les psalmodies du muezzin, pour que tout bascule au grand désarroi de Maurice, qui se serait amplement contenté de son bureau en guise de chambre — si Mahmoud ne l'y avait pas surpris en pyjama.
 
Excédée par la répétition aussi accidentelle que matinale des chants religieux, Lærke, voisine du jeune pratiquant, descend avec l'intention ferme de « confisquer » ce réveil.
Mahmoud, contrit face aux avanies déversées par sa voisine, n'en tombe pas moins amoureux, et demande à Maurice son aide éclairée afin de conquérir le cœur de l'irascible jeune femme. Aide que Maurice, malgré toute l'ironie affichée de son pragmatisme, finira par accorder à Mahmoud.
Sauf que… Rien de ce qu'ils prévoyaient ne va dans le bon sens, et tout amènera cette joyeuse troupe jusqu'à un bouquet final des plus inattendus.
 
Maurice et Mahmoud est une comédie drôle et dynamique, un agréable moment de lecture grâce à la spontanéité de la plume de Jensen.
Calquée sur le modèle des pièces de boulevard, les portes claquent (se bloquent plus précisément), les personnages tonitruent, entrent et sortent du huis-clos que devient au fil du récit l'appartement de Mahmoud.
Une galerie de portraits tous aussi savoureux les uns que les autres, un Imam boulimique, un avocat couard, une huissière allergique aux courants d'air, un couple de poissonniers caractériels. Les quiproquos s'enchaînent dans une drôlerie pleine d'idées (notament un astucieux système permettant aux guirlandes de Noël de se retracter immédiatement au fond des placards, en cas de venue inopinée de madame Mahmoud mère, très attentive à la pratique du culte musulman de son rejeton).
 
Mais cet ouvrage n'est pas uniquement une galéjade littéraire.
C'est également, et sans doute avant tout, une fable de mœurs au dénouement heureux, qui nous rappelle les vertus essentielles de la  tolérance d'autrui, l'acceptation et l'intégration de ses différences, quelque soit son culte, son origine ou sa condition sociale.
 
Et si l'amour triomphe, ce n'est pas sous le joug de la mièvrerie, mais bien à la lumière des qualités humaines que Flemming Jensen insuffle aux principaux protagonistes de son récit.
 
La constante référence à Nat King Cole (exclusivement sur des vinyles que collectionne compulsivement Mahmoud — les puristes apprécieront), constitue la parfaite « bande son » de ce livre.


Maurice et Mahmoud, Flemming Jensen, Gaïa (2013), traduit du danois par Andreas Saint-Bonnet, 208 p., 19 euros.
 
 

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