Où un "jeune" conseil le Passage de Sachar à un "vieux"...

Avec le temps, il arrive forcément ce moment un peu surprenant – et presque désagréable – où un jeune, souvent un adolescent, vous conseille un livre. Deux pour ma part. Manque de chance, le premier était mauvais, au point que j’ai repris ma bibliothèque, observé les livres de mon adolescence afin de me poser cette question existentielle : est-ce que je manquais, moi aussi, de jugement à cet âge ? Dur d’y répondre sincèrement, je ne me souviens que des bons livres : l’Enchanteur de Barjavel, les Orphelins Baudelaire de Lemoni Snicket, Enfance, Adolescence, Jeunesse de Tolstoï, les Justes de Camus, Harry Potter de J. K. Rowling, le Monde de Narnia de C. S. Lewis… Bref, seul le Panthéon de l’excellence reste en ma mémoire. Je sais qu’il y a eu des ouvrages plus critiquables tel des Marc Levis, mais je ne saurai être plus précis.

Cependant, le deuxième ouvrage qui me fut prêté me rendit espoir : il m’avait été présenté comme bon et il l’était ! La jeune génération a donc le même sens critique que la/les notre(s) à son âge…

Il s’agit justement d’une histoire de jeunes. De Stanley Yelnats plus exactement. Ce jeune a eu la malchance d’être envoyé au camp du lac vert. Malchance car il avait été arrêté et condamné pour un crime qu’il n’avait pas commis, le vol d’une paire de baskets. Le juge avait laissé le choix aux parents : prison ou camp. Sans leur laisser le temps de se renseigner. Ils avaient choisi le camp, en espérant, de manière peut être un peu naïve, que cela ressemblerait, qui sait, à une colonie de vacances. En un peu moins agréable.

C’était beaucoup moins agréable. L’ombre était une denrée rare, si ce n’est inexistante. Les activités consistaient, tout simplement, à creuser. Creuser. Toujours creuser. Chaque jour, à partir de 4h30 du matin, les jeunes devaient creuser des trous de 1m50 de profondeur et de diamètre – soit la longueur de leur pelle – dans le sol. Creuser leur apprendrait à canaliser leur énergie, à prendre conscience de beaucoup de choses.

Si on prend un mauvais garçon et qu’on l’oblige à creuser tous les jours un trou en plein soleil, il finira par devenir un gentil garçon.

Et surtout, cela leur permettrait de remonter à la surface « des objets intéressants que le Directeur voulait voir ». Pas de fossile par contre… Une chasse au trésor géante ? Si seulement l’ancêtre de Stanley avait tenu promesse auprès d’une vielle sorcière gitane… La légendaire malédiction familiale ne frapperait pas ce pauvre enfant.

L’ouvrage de Louis Sachar, le Passage, est sans prétention. Il est juste excellent dans sa simplicité. Une histoire, quelques personnages, quelques flashs backs, un décor – celui d’un lac asséché – une écriture rapide et efficace. Du début à la fin, le lecteur croit à cette histoire ou, tout du moins, souhaite y croire : un quotidien monotone et marqué par l’injustice social que le destin se charge d’embellir.

Une seule chose me reste à l’esprit au moment de rendre cet ouvrage à sa propriétaire : pourquoi le livre, Holes (les trous) en version originale, s’appelle-t-il en français le Passage ?

Pierre Chaffard-Luçon

Louis Sachar, Le Passage, traduit de l'américain par Jean-François Ménard, Médium éditions & L'école des Loisirs, 2000, 278 p. - 9€50.

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