Anna et Marco forment un jeune couple WASP  à priori sans histoire. A peine contrarié par l’arrivée de son premier bébé, Cora, une petite fille adorable mais  qui pleure beaucoup, épuisant ses parents, surtout sa mère en proie à une déprime post partnum. Rien de grave toutefois, les grands parents sont là.  Alice, La  grand-mère ainsi que Richard, le grand-père – ou beau-père – feraient n’importe quoi pour Anna et Cora. Et ça tombe bien peut-on dire,  car une nuit la petite fille est enlevée dans son lit pendant que ses parents font la fête chez leurs inquiétants voisins d’à côté, fans de vidéo. Les malfrats qui ont enlevé le bébé réclament des millions de dollars. Un choc psychologique mais une formalité financière pour Alice et Richard à la fortune colossale.

Rien ne fonctionne comme prévu. Quand Marco va au rendez-vous fixé par les kidnappeurs,  il est agressé, l’argent est subtilisé, mais la petite fille reste introuvable.

Une terrible descente aux enfers attend alors le couple, des secrets qui pourraient remettre en question l’hypothèse d’un simple kidnapping sont dévoilés. Le jeune homme qui n’a jamais été accepté par ses beaux-parents est un bourreau de travail qui veut leur démontrer sa valeur. Mais ses affaires qui ont été très prospères ne le sont plus, il est même au bord de la faillite, ne l’accepte pas et le cache à sa femme. Anna, quant à elle, brillante galeriste qui a arrêté de travailler à la naissance de l’enfant a toujours été fragile nerveusement. Des camarades de collège en ont fait vingt ans plus tôt l’amère expérience. La maternité n’est  peut être pas la seule cause de  son comportement étrange, de ses trous de mémoire effrayants, ce qu’elle n’ébruite pas non plus

Quand à Richard, il semblerait que l’homme d’affaires richissime connaisse lui aussi quelques trous d’air et ait bien des choses à cacher.

Dans ce premier roman, la canadienne Shari Lapena imagine une intrigue terrifiante, un suspens qui emporte le lecteur jusqu’à la dernière page. Les ressorts psychologiques de ses personnages apparemment bien sous tous rapports suffisent à la  dynamique parfaite, à la construction d’une histoire agencée au millimètre près. Aucun de ses personnages ou presque n’est mauvais ou malfaisant pris à part, mais dans l’alchimie négative de leur rencontre : parents surprotecteurs, fille névrosée, gendre honni, le pire du genre humain est mis au jour.

Mensonges, manipulations, vengeances, coups bas, appât du gain, tout est permis dans  Le couple d’à côté avec pour otage de la cupidité des uns, de la folie et de l’orgueil des autres, la vie d’une innocente fillette de trois mois.

Dans sa description apocalyptique d’un mariage dans lequel aucun des deux protagonistes ne sait plus qui il a épousé, l’auteur se hisse à la hauteur de maîtres du genre comme Douglas Kennedy dans Une relation dangereuse, voire Piège nuptial ou Gillian Flynn dans Les apparences. Une belle réussite.

Brigit Bontour

Shari Lapena, Le couple d’à côté, Presses de la cité, septembre 2017, 330 pages, 21,90 €