Tours de détours d'Europe par Jean Buhler

Les éditions La Baconnière republie le roman de jeunesse (et de formation) de Jean Buhler paru en 1942 chez Payot. Il prouve hier encore plus qu'aujourd'hui combien les voyages forment la jeunesse. Lorsque celle-ci est lucide, elle permet d'en apprendre beaucoup sur le monde. 

Au sein d'une écriture rebelle à tout effet, l'auteur fait preuve d'une vision précise de ce qui se passait dans toute l'Europe des Balkans avec retour au Jura Suisse patrie de l'auteur.

A travers de tels voyages l'éternel vagabond, sorte de Kerouac de la vieille Europe possède un regard perçant et non sans humour.
De passage dans l'Allemagne d'Hitler il écrit : "Dans la rue déserte, je savoure ma quiétude au hasard du grand soleil. Je croyais que l'abdication de la liberté était plus compliqué que cela, vraiment".

Très vite le natif de la Chaux-de-Fonds comprends que "toutes les questions sont des questions de force. L'Histoire c'est  la course au flambeau de la force des nations dominantes". En étant Suisse le jeune écrivain possède le regard de Sirius et met à mal les amabilités des penseurs mondains de l'époque.

Certes Buhler n'a pas la cruauté d'un Céline mais fait bonne figure auprès de Blaise Cendrars dont il fut l'ami et le confident. Il montre l'évidence absurde d'un monde où les nazis fanfaronnent en riant entre eux afin de se prendre pour les plus  glorieux hommes.

Un tel livre signe l’avènement de l'homme "qui devient" et qui n'est que le gnome de l’homme devenu. Car Buhler ne souffre pas du myopie. Il  soulève les robes de l'Europe morcelée et en proie aux dangers de l'entre deux guerres pour en montrer le cul.

Jean-Paul Gavard-Perret

 

Jean Buhler, Sur les routes d'Europe, La Baconnière; Genève, janvier 2019, 200 p., 16 €

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