Ce livre est étonnant. Il raconte pourtant quelque chose de simple : une enfance lorraine dans les années '70. Et dans un milieu populaire. Nous croyons nous retrouver au côté du héros et de ses amis qui s'ennuient ferme. Certes il y a la fête foraine, le foot, les pylônes électriques à escalader au mépris de tout danger, les dérives au bord de la Moselle,  les wagons désaffectés de l’usine, les tunnels interdits mais à visiter.

L'auteure nous fait partager le mal vivre d'un héros qui se sent différent et raté. La honte tient parfois à ces taches de rousseur dont ses compagnons se moquent parfois au  fait de participer lâchement aux provocations douteuses contre les voisins arabes. Mais peu à peu l'enfant comprend la frontière qu'il existe entre la barre d’immeubles où vivent les familles arabes et celui  de modestes maisonnettes où vivent les autochtones. La bêtise des adultes a déjà contaminé celles les enfants. Et nous assistons à ce temps passé raconté judicieusement au présent.

Fabienne Swialty évite tous les poncifs, écrit sèchement sans jugement hautain ou mièvrerie flétrissante. Elle nous plonge dans un monde de sensations où à la sueur se mêle celle de l'encens. 

Jean-Paul Gavard-Perret

Fabienne Swiatly, Saïd, Éditions La Fosse aux ours, mars 2022, 74 p.-, 12€