Rock'n'Roll Circus, de Sam Bernett, ou les derniers instants de Jim Morrison

La mort de Jim Morrison a fait verser des larmes… et couler de l’encre. Sa vie aussi. Dernier titre en date :  Jim, d’Harold Cobert (éditions Plon, sortie prévue le 25 septembre 2014) soit un nouvel opus qui vient s’ajouter à la très longue liste des récits consacrés à celui qui fut, entre autre, le cofondateur des Doors. J’écris sciemment entre autre car Jim, le chanteur, éclipse souvent le poète qui publiait ses textes sous le nom de James Douglas Morrison, et qui, dès 1968, signifiait déjà son désintérêt pour le rock et sa passion pour l’écriture.

James Douglas Morrison, c’est tout d’abord cet excellent élève qui étudie très tôt  les œuvres de Joyce, Rimbaud, MacClure, mais aussi celles de Plutarque, Montaigne ou Nietzsche. Plusieurs de ses professeurs témoigneront plus tard de leur fascination pour l’étendue des connaissances de cet élève singulier et la pertinence de ses travaux consacrés à la philosophie nihiliste, à l’histoire médiévale ou à la peinture flamande. Aujourd’hui, James Douglas Morrison est devenu une grande figure de la poésie américaine, l’auteur notamment de The Lords and The New Creatures, une œuvre profonde qui trône désormais dans toutes les universités américaines, et que l’on rattache à la contre-culture des années soixante et soixante-dix. Mais refermons un instants les livres de James Douglas pour revenir vers la figure mythique de Jim, le chanteur. Car c’est de celle-ci dont il est question dans Rock ‘n Roll Circus de Sam Bernett.


Avec un talent indéniable de conteur, l’auteur de ce récit rafraîchissant entraîne son lecteur dans la folie des Seventies, une décennie qui a vu éclore une génération préservée du chômage, de la précarité, du sida, et qui a réussi le tour de force d’imposer ses valeurs, ses codes et ses modes à ses aînés. L’ouvrage de Sam Bernett, à travers les blessures et les bonheurs de son auteur, livre à ses lecteurs une réflexion sur la drogue, l’alcool et la vie singulière de l’homo noctambulis, ennemi juré du marchand de sable à une époque où la plage prenait le pas sur les pavés. 


Le Rock’n’Roll Circus, c’est le nom de cette discothèque parisienne où se rencontrent alors les célébrités du moment. Le récit de Sam Bernett avance au rythme d’anecdotes inédites et drolatiques où se croisent pêle-mêle, Michel Polnareff, qu’une fiancée jalouse tente d’assassiner à l’arme blanche, Yves Saint-Laurent et Pierre Bergé, mêlés à une rixe de voyous en goguette, Keith Richard, pris pour un simple SDF, Jim Morrison et Richard Bohringer fin saouls au comptoir, Salvador Dali, faisant monter une Harley Davidson dans la chambre de son palace, mais aussi Mick Jagger, Johnny Hallyday, Eric Clapton, Steve McQueen, ou même Jacques Prévert croisé au petit matin. A cette époque, le Rock’n’Roll Circus est une cour des miracles où l’on vit, rit, s’aime (parfois nu en public), pleure, mais où l’on meurt aussi.


Rompant un silence vieux de quarante ans, Sam Bernett révèle ici qu’il a retrouvé le chanteur des Doors, sans vie, dans les toilettes de l’établissement qu’il dirigeait. L’icône du rock ne se serait donc pas éteinte d’une crise cardiaque dans sa chambre d’hôtel mais serait bien morte d’une overdose d’héroïne, la veille au soir, dans une boîte de nuit située rue de Seine.


Aussitôt après la publication de ce livre, la version de Sam Bernett est battue en brèche par des contradicteurs professionnels, absents à l’époque des faits, mais qui s’accrochent néanmoins à la version officielle. Sûr de son fait, et n’ayant plus rien à prouver à personne, l’auteur ne s’en émeut pas et maintient ses dires. Jusqu’à ce 6 août 2014, jour où Marianne Faithfull herself, (vieille gloire du rock, amie de Jim Morrison et présente à Paris ce jour-là) s’est sentie obligée de mettre un terme aux rumeurs, presque un demi-siècle après les faits. Lors d’une interview accordée à un quotidien anglais elle confirme l’exactitude de la version de Sam Bernett.


Bientôt septuagénaire, et après cinquante années de carrière, Marianne Faithfull est, comme elle le dit elle-même, l’ultime survivante de cette histoire, et donc la seule à pouvoir raconter sa version de la mort de Jim Morrison… La dernière, avec Sam Bernett.

Thierry Maugenest

Sam Bernett, Rock'n'Roll Circus, Editions du Rocher, octobre 2010, 213 pages, 18 €

4 commentaires

Mort par overdose de Jim Morrison dans les toilettes d'un bauge, mais pourquoi cela choquerait ? 

J'ignore si c'est choquant ou pas, la question est de connaître enfin la vérité. Cette nuit-là, Jim Morrison est mort à cause du comte Jean de Breteuil (issu de la lignée des marquis de Breteuil) le plus célèbre dealer français...

Non, la version de Marianne Faithfull ne corrobore pas la version de Sam Bernett ! Elle dit trés clairement que son ami (et dealer) le comte Jean de Breteuil s'est rendu au domicile de Morrison, rue Beautreillis (et non au Rock'n Roll Circus) pour lui amener les substances mortifères dont il était un pourvoyeur attitré. D'ailleurs le récit de Bernett ne semble pas trés crédible (il parle d'un Jim barbu alors qu'une photo prise 2 jours avant le montre rasé !). 

 

Marianne Faithfull, dans son interview évoque pourtant clairement les toilettes du Rock n' Roll Circus, une info reprise alors par les médias français. Quant à la barbe de Jim, il faudrait demander à l'auteur... ce point n'est pas évoqué dans le livre en tout cas...