Le "CosmoZ" de Claro vous aspire dès le premier mot

Quand tout est gris l’appel à la magie s’impose. S’invite alors un écrivain. Un certain L. Franck Baum qui publie en 1900 le célèbre Magicien d’Oz. Trente-neuf ans plus tard, un film aidant, le mythe est né. Il n’en faut pas plus pour que Claro s’en empare. On connaît son talent de traducteur. On découvre sa puissance narrative. Son imagination débridée. Il nous livre un pavé qui se lit sans respirer. Une épopée à prendre comme le livre des métamorphoses. Rien n’est vrai, tout est crédible. La fiction est mise au service de la subversion. Elle abolit les frontières : il n’y a plus d’imaginaire ni de réalité. Seule la langue tisse son canevas pour évoquer ce qui se passe sous nos yeux ébahis. 


Dans une mixité relative, les personnages du Magicien traversent le XXe siècle, pour le pire. Des tranchées de 14-18 à la révélation nucléaire d’Hiroshima, ils tenteront vaille que vaille de découvrir leur Oz. Même au péril de leurs vies. Pris dans la tornade de l’Histoire. Englués dans ce monde gris qui s’impose dès la première page.


Vous serez saisi en ouvrant ce livre. Dès le premier mot vous serez aspiré. Et vous vous attacherez à Dorothy et son chien Toto. Emportés par une tornade. Bien réelle, celle-là, et puissante, au point de les transporter ailleurs. Dans une autre vie. Pour y faire la connaissance du Bonhomme en Fer-Blanc, à l’Epouvantail, au Lion Poltron ou à la sorcière de l’Ouest...


Mêlant dans un tourbillon hallucinant les scènes, Claro impose cette anti-féérie en revisitant un demi-siècle de barbarie. Mais le futur sera-t-il enfin merveilleux ? Rien n’est moins certain...
Entre tragédie et vaudeville, CosmoZ est une odyssée poignante. Des charniers aux asiles de fous, du Los Angeles des années 1940 au massacre des indésirables, les personnages seront confrontés aux expériences au radium, à la mise au point des gaz mortels ou au règne du barbelé. Ces orphelins du siècle réclameront leur part de bonheur. Et tâcheront de découvrir le sens de l’ineffable syllabe Oz.


Cette clé magique ouvrira-t-elle un monde autre ?
Ce roman qui est aussi un conte se lit comme un long poème en prose. On voit sans peine. Comme une caméra virtuelle qui nous montrerait la beauté du désastre. Ce manière qu’on les hommes d’embraser ce qu’ils aiment. De sublimer le cauchemar. Une lecture en apnée qui nous maintient suspendus entre ciel et terre.
Une expérience surprenante...


Annabelle Hautecontre


Claro, CosmoZ, coll. "Domaine français", Actes Sud, août 2010, 484 p. - 22,80 €    

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