Neil Gaiman laisse exploser tout son talent avec "Anansi boys", les enfants du dieu araigné !

Charles Nancy dit « Gros Charly » est le parfait quidam. Sa vie au paraître monotone se résume jusque-là à un travail quelconque de comptable partagé avec une liaison sentimentale pantouflarde. Au quotidien, cela se résumerait à métro, boulot, dodo. Mais le quotidien de Charles Nancy va bientôt se dérober laissant place à une réalité à la fois sombre et farfelue. Il est en effet le fils d'Anansi, le dieu araignée dont l'intelligence n'est égalée que par une mesquinerie sans limites. Et lorsque son père vient à décéder, survient alors un héritage lourd de conséquences et une gémellité dont il se serait bien passé. Bienvenu dans l'univers psychédélique de Neil Gaiman.

Que Neil Gaiman a bien grandi depuis ses débuts  en tant que scénariste de comic book chez Vertigo ! Son Sandman littéralement plébiscité autant par la critique que par le public résonne encore aujourd'hui dans son œuvre. Mais elle est désormais plus mature empreinte à la fois de virtuosité et de couleurs culturelles les plus diverses. Le rebelle des années quatre vingt dix a laissé place à l'un des auteurs majeurs de son genre parmi sa génération.

Le récit prend place dans l'univers déjanté de son autre monument qu'est American Gods. Au sein d'un univers à la fois étrangement familier et décalé, les personnages de Gaiman côtoient des êtres surnaturels, dieux totémiques trouvant refuge parmi les hommes. A travers Anansi Boys, tout le talent de Gaiman éclate au grand jour à travers une écriture transpirant la maturité, laissant entrevoir les situations les plus cocasses mais aussi les plus noires. Le récit est littéralement transfiguré par les références culturelles toutes plus éclectiques les unes que les autres, preuve du travail colossal de l'auteur mais aussi témoignage d'une culture hors norme. Citant autant Platon que les titres musicaux américains les plus obscurs, faisant appel au syncrétisme religieux le plus singulier ou aux références culinaires les plus folles, Anansi Boys est un joyeux fourre-tout iconoclaste à la fois jouissif et cruel. A l'image de ces jumeaux tenant à la fois des Dioscures et de Dr jekyll et Myster Hyde, évoquant la dualité artistique à peine voilée qui entoura l'auteur, lui l'Anglais exilé Outre-Atlantique afin d'y quérir la reconnaissance qui lui est due. Tous doutèrent à l'époque, mais plus personne désormais ne remet en cause cette décision à l'image de ses héros.

Anansi Boys représente le dernier bastion d'une sous-culture méprisée par les uns, encensée par les autres, qui sera tant de fois copiées, souvent peu égalée, et dont l'auteur, dernier rempart, constitue l'un de ses derniers génies.

François Verstraete



Neil Gaiman, Anansi boys, traduit de l'anglais (USA) par Michel Pagel
Au Diable Vauvert, mai 2006, 504 pages
, 22 € 

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