"Elbrön", de nouveaux horizons pour Thierry Di Rollo


"La nève recouvre tout. Les flocons sont comme une brume pointillée et innombrable. Il fait froid. Bankgreen, immense, se replie sur ses terres toutes blanches. Il y a des arbres-liges défeuillés qui déploient leurs branches noires sur les hauteurs les plus proches ; rondeurs nues à peine sorties du fond ennèvé. "


Quand un novice s’essaie à la Fantasy…


Elbrön est la suite de Bankgreen, roman de Thierry Di Rollo qui constituait sa première incursion dans la Fantasy. Auteur remarqué, Di Rollo est surtout connu pour des romans de science-fiction et a même écrit une série noire : il est a priori loin, très loin du genre…


Sur Bankgreen, le jeu du pouvoir opposait deux races, Digtères et Arfans. Ces derniers avaient réduit en esclavage les Shores. Travailleurs des mines, ils faisaient figure de prolétariat exploité. Il y avait aussi les Runes, qu’on peut apparenter à des fées, qui visitent ce monde et ces habitants, tentant d’influer sur leur destinée. Cette trame apparente ce roman à un genre bien particulier, la Space Fantasy, dans lequel notamment Anne McCaffrey s’est illustrée avec son cycle de Pern. D’une telle histoire on peut tout faire…


Le porteur de mort


Bankgreen narrait aussi les derniers moments de Mordred le Varanier, croisement entre un chevalier déchu et l’ankou des légendes bretonnes, doté de la capacité de prédire le moment du trépas de ses futures victimes pour leur procurer une mort plus douce. Dernier de sa caste, il était devenu l’instrument du destin tout autant que le témoin de la mort des Digtères et des Arfans. Quand Elbrön commence, nous sommes soixante-dix ans après les évènements du premier volume. Les Shores vivent désormais seuls quand des créatures décharnées apparaissent. Elles s’appellent des Elbröns et abritent les âmes des guerriers Arfans et Digtères. Ils viennent réclamer leur dû, leur planète. Mais Bankgreen est-elle vraiment la cause de leur retour ? Ou bien les Runes en sont-elles responsables ? C’est alors que Mordred renaît, amnésique, prêt à reprendre son errance sur Bankgreen et à entraîner les Shores à la guerre contre les Elbröns.


À découvrir


Difficile de résumer ce roman, beaucoup plus limpide et précis que le touffu Bankgreen. Thierry Di Rollo crée une ambiance particulière, au style dépouillé des archaïsmes qui plaisent à trop d’auteurs du genre, de ces formules qu’on croirait sorties d’un mauvais recueil de poésie. Au contraire, la lecture de ce roman est envoûtante, et incite à relire Bankgreen (que l’auteur de ces lignes a trouvé compliqué, à la limite de l’incompréhensible). De plus les Elbröns sont loin d’être des morts-vivants classiques : ils pensent, parlent, raisonnent, se souviennent de leur vie passée. Etrange personnage enfin que ce Mordred, qui recherche les circonstances de sa mort, intervenue dans le précédent volume… L’histoire est aussi remplie de personnages simples, touchants, pris dans la folie d’un combat qui les dépasse. Leurs destins ne laissent pas indifférents. Voici donc un roman qui donne envie de lire Thierry Di Rollo, auteur qui a définitivement plusieurs cordes à son arc.

 

Sylvain Bonnet


Thierry Di Rollo, Elbrön, le Belial, préface de Pierre Pelot, septembre 2012, 358 pages, 20€

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