Antoine Deloye est un trader sans histoires jusqu’au jour où sa petite amie est tuée.

Sa culpabilité ne fait aucun doute sauf qu’il accuse Franck son frère jumeau d’avoir assassiné la victime pour lui nuire. Franck et Antoine Deloye sont deux frères qu’il est impossible de différencier. Ils se ressemblent comme deux gouttes d’eau. Dès la maternité, leurs parents avaient renoncé. L’un des deux jumeaux au moins semble possédé par le mal, à moins qu’il ne s’agisse des deux. Ou que, plus troublant, l’un et l’autre soient à tour de rôle attiré par la transgression. C’est Franck qui aurait à l’âge de quinze ans décapité le chien de la maison avant d’être mis dehors. La petite sœur cadette aurait succombé de façon suspecte tandis que les parents ont selon la version officielle trouvé la mort à cause d’un poêle défaillant. Là encore Franck est largement suspecté. Mais comment assurer qu’il ne s’agit pas d’Antoine, l’un et l’autre échangeant les identités en permanence à l’école ou la maison ?

 

Tandis qu’Antoine après de bonnes études est devenu trader, Franck lui vit de petits boulots. S’ils ne vivent pas ensemble, ils se voient, « des frères restent des frères » dit Antoine.

 

Le commissaire Robert Laforge chargé de l’enquête tente sans grand succès de comprendre qui d’Antoine, qui de Franck a pu commettre l’irréparable, les deux semblant assez dérangés pour être passés à l’acte. Il parvient tant bien que mal à se forger une opinion et à distinguer le coupable jusqu’au  dénouement magistral.

 

Dans ce troisième roman au suspens qui ne faiblit jamais, et va bien au-delà de l’intrigue policière, Jaques Expert interroge la naissance du mal chez l’enfant en mettant en scène une gémellité poussée à son paroxysme. Pourquoi un des garçons ou les deux deviennent des monstres impossibles à distinguer ? Quel dévoiement familial est à l’origine du drame ? À moins qu’il ne s’agisse du désir de deux jumeaux de se bâtir un monde propre dont l’humanité entière serait exclue. Fort et troublant.

 

Brigit Bontour

 

Jacques Expert, Deux gouttes d’eau, Sonatine, janvier 2015, 330 pages, 19 €