Vaines affabulations à La Colline

Il y a un prologue : un homme prononce des phrases qui parlent du sens. Dans un une habitation vaste, peu différenciée, il est question de rêve, de la vie d’un couple, le discours manifeste une tendance à la logorrhée. Une guitare électrique accompagne de ses rifs les monologues du personnage principal, un mari torturé par sa paternité. Le déplacement des grands pans de murs transforment une grande salle en un labyrinthe de cloisons. De gigantesques tableaux de style classique donnent une sombre profondeur au décor. Le texte raconte une conversion tendanciellement pathologique ; il présente une succession d’exultations verbales exprimant l’exacerbation d’une conscience en proie à ses ambivalences, l’amenant à conjuguer profession de foi et profanations. La pièce tente de nous faire pénétrer l’univers hypocondriaque et hypnotique des troubles de la filiation et de la ferveur spirituelle.

 

Las, le texte s’épuise en vociférations, en réflexions : il est sans cesse question de ce dont on parle, de la mise en scène de ce qu’on est en train de faire. L’aspect redondant, la stérilité de la réflexion mise en œuvre épuisent vite l’attention du public. Une élucidation des rapports de filiation qui confine à l’auto-dénégation. Un épuisement de la relation qui correspond à son inversion autant qu’à sa sublimation. Le propos est manifestement trop didactique. La mise en scène est très belle, habitée par de grands tableaux calqués d’œuvres célèbres ; le jeu d’ombres et de lumières donne de l'ampleur à l’ensemble. Toutefois le décor procède d’un esthétisme un peu grandiloquent, à l’image d’un propos foisonnant et peu contenu. Le jeu fait de proférations brusques de Stanislas Nordey se surajoute vainement à l’emphase de la pièce, en la redoublant vainement. Le texte ne cesse de parler de ses lectures de ses interprétations ; il dit cent fois l’intention d’investigation dont il procède sans jamais se résoudre en élucidation. Une débauche de moyens verbaux, visuels, scéniques qui laisse une impression de vanité tant ses effets sont éloignés de ses prétentions.

 

Christophe Giolito

 

Affabulazione de Pier Paolo Pasolini, mise en scène Stanislas Nordey

 

Avec

Marie Cariès, Raoul Fernandez, Thomas Gonzalez, Olivier Mellano, Anaïs Muller, Stanislas Nordey, Véronique Nordey, Thierry Paret

 

Traduction de l’italien Jean-Paul Manganaro
Collaboratrice artistique Claire ingrid Cottanceau
Scénographie Emmanuel Clolus
Lumières Philippe Berthomé
Musique Olivier Mellano
Son Michel Zürcher
Costumes Raoul Fernandez
Perruques Catherine Saint Sever
Assistanat à la mise en scène Anthony Thibault
Régie générale Antoine Guilloux
Confection robes Atelier Caraco Canezou/Paris
Construction du décor Ateliers Théâtre de Vidy
Peinture sol Valérie Menuet
Peinture du décor Sibylle Portenier

 

Au théâtre La Colline Théâtre national 15 rue Malte-Brun 75020 Paris 01 44 62 52 52

http://www.colline.fr/fr/spectacle/affabulazione

Du 12 mai au 6 juin 2015, du mercredi au samedi à 20h30,

le mardi à 19h30 et le dimanche à 15h30

Grand Théâtre durée 2h20.

 

Production

Théâtre Vidy-Lausanne, coproduction La Colline – théâtre national, Théâtre National de Bretagne – Rennes, Compagnie Stanislas Nordey, La Comédie de Saint-Étienne – CDN, Théâtre national de Strasbourg avec le soutien de Pro helvetia - fondation suisse pour la culture.

 

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