Les résistantes : Filip Forgeau

Où sont les hommes ? Telle est la question qui pourrait résumer ces deux pièces. Non qu'ils soient absents mais parce qu'ils disparaissent chacun à leur manière. De Pierre Curie comme de Franz Kafka ne restent que les larmes pour les pleurer au nom de l'amour, soit par fusion, soit par écart.

Les deux héroïnes comprennent, qu'à l'exception de ceux qu'elles chérissent,  les hommes se laissent glisser au bord d'un gouffre qu'ils construisent eux-mêmes pour y plonger parfois toute la nature humaine. Au mieux, ils se laissent balloter  avec indifférence au gré des "évènements que les maîtres concoctent. 

Existent donc les chants d'amour, de reconnaissance mais aussi d'appel de deux femmes qui – au delà de leurs sentiments – permettent à l'homme de gravir la montagne et voir l'autre versant. Ils ne peuvent pour y parvenir que compter sur de telles égéries.

Preuve qu'elles sont bien l'avenir de l'homme. En dehors d'elles point de salut. Et les baisers "écrits" par de telles femmes se posent ailleurs que sur le papier. Ils offrent un indicible espoir. Car de telles héroïnes d'exception  contemplent le ciel, mais scrutent aussi  la terre.
Elles se battent pour mettre fin à un certain ordre qu'elles ne dominent pas mais elles inventent, face à lui,  un alphabet physique des terres sauvages.  L'auteur le jette dans ses deux pièces comme un projectile pour remonter le temps et faire déborder l'histoire jamais finie.  Celle des frontières coupées ˆà la scie" mais dont il faudrait brouiller les divisions aléatoires pour un autre partage.

 

Jean-Paul Gavard-Perret

 

Filip Forgeau, La Chambre de Marie Curie suivi de La Chambre de Milena, éditions Les Cygnes, décembre 2020, 96 p.-, 12 euros

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