Emily Dickinson : quand le silence se fait

Les éditions Unes ont choisi d’éditer la poésie d’Emily Dickinson en proposant de débiter l'œuvre par année à travers chaque fois des poèmes significatifs témoins des évolutions de son écriture poétique.
Ce choix éditorial en vaut bien d'autres. Et ce livre regroupe des textes écrits au lendemain de la guerre de Sécession. S'y marquent pour l'auteure une période de repli et d'un certain dépérissement ou déréliction : Je cherche l’Obscurité / Jusqu’à m’être totalement ajustée. /C’est un travail grave / De douce austérité.
D'où la puissance de ce corpus.
L'auteure lutte contre la séparation dans un temps d'après-guerre où se constatent ses ravages. C’est aussi une tentative de recréation du monde, une quête improbable de printemps tandis que tombe la neige en ombres appesanties.
Le problème reste que la poésie de Dickinson demeure des plus difficile à traduire. S'ajuster à une telle poésie est difficile tant elle joue sur une certaine abstinence que crée la langue anglaise et qui ne trouve pas forcément son équivalent en français.
Néanmoins cet ensemble montre comment celle qui fit toujours en lien avec la nature, "joue dans le dos du jour" dans une transfiguration même si elle est toujours plus habitée par les morts que les vivants. Ce qui prouve aussi que l'invisible n'est jamais loin.
Jean-Paul Gavard-Perret
Emily Dickinson, Je cherche l'obscurité, traduit de l'anglais (États-Unis) par François Heusbourg, postface de Raluca Maria Hanea, Unes, novembre 2021, 186 p.-, 20 €
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