Viveca Sten, Au cœur de l’été

Nuit de la Saint Jean sur l’île paradisiaque de Sandhamn à une heure de ferry de Stockholm. La lumière polaire est sublime, les grands bateaux blancs conduits par des adolescents accostent les uns après les autres pour une nuit de fête qui devrait être inoubliable.

Mais très vite, l’alcool et la drogue s’invitent aux agapes et c’est un carnage. Des gamines  à peine sortie de l’enfance trop maquillées et court vêtues errent à la limite du coma éthylique sur le port, tandis que les dealers venus d’Europe de l’est  font les meilleures affaires de l’année. Sous l’effet de  mélanges hasardeux vodka-ecstasy-cocaïne, des bagarres éclatent ;  Victor : un garçon de seize ans, est retrouvé mort sur une plage.

Tandis que Nora Linde et son nouveau compagnon,  Jonas, doivent faire face à la disparition de Wilma la très jeune fille de quatorze ans de celui-ci, Thomas Andreasson, le policier, héros récurrent de Viveca Sten, mène l’enquête. Si dans un premier temps,  Tobias  le meilleur ami de Victor, peu clair sur le déroulé de sa soirée, est suspecté, les conditions de vie de ces jeunes prennent vite le pas sur la recherche de la vérité. Tous ou presque sont des enfants de familles très aisées mais dont les parents sont divorcés ou ne s’entendent pas. Arrivés à la barre de bateaux valant des fortunes, ils sont perdus, désespérés et n’ont d’autre refuge que les paradis artificiels.


Dans ce polar sombre, hors-norme, il apparaît très vite que le suspens, la recherche du coupable sont  comme relégués au second plan devant  les causes sociétales ayant indirectement conduit au meurtre. Tobias  par exemple a un lourd bagage familial. Fils d’un  avocat  fortuné, il  est né très vite après la disparition accidentelle d’une petite sœur, a été couvé par une mère dépressive et un grand frère dont ce n’était pas le rôle avant que la famille explose et que le père se remarie avec une femme plus jeune et un nouvel enfant.

Du côté de la victime avec laquelle, il s’était égaré dans l’addiction, le roman familial est à peine moins douloureux. Le père de Victor, financier de haut vol méprisait sa femme, souhaitait ardemment que le garçon, le plus jeune de  ses enfants soit à sa hauteur de self made man brutal  et ne trouve pour apaiser son chagrin que des méthodes de mafieux.

 

Richesse, déclassement, pertes des valeurs forment la trame de ce roman noir et puissant dans lequel la psychologie adolescente est finement analysée.  Sans doute le livre le plus abouti, le plus ambitieux de Viveca Sten qui se perfectionne au fil du temps.

 

Brigit Bontour


Viveca Sten, Au cœur de l’étéAlbin Michel,  mai 2016, 432 pages, 22 eur

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