Shakespeare et le feu souterrain des poèmes

Après avoir publié il y a près de cinquante ans les Sonnets" de Shakespeare, la Bibliothèque de la Pléiade en offre une nouvelle version dans la cadre de la publication de ses œuvres complètes. Se retrouvent donc ici, en une édition bilingue, les œuvres versifiées majeures de l'auteur : "Vénus et Adonis", "Le Viol de Lucrèce" et bien sûr les célèbres sonnets.

Si Shakespeare doit sa célébrité mondiale à son théâtre, ses poèmes ne sont en rien travaux connexes. Les poèmes narratifs tout comme les sonnets  permettent d'entrer dans les thèmes et  l’intimité d'une écriture qui au-delà du temps reste subversive tant par ses propos que  sa forme.
Même le sonnet – espace stricte s'il en est – étonne chez Shakespeare. Exit le pétrarquisme et la douceur mais non la maîtrise de la forme fixe. Ici le sonnet met à mal les amoureux transis. La rigidité permet paradoxalement une liberté qui n'empêche pas néanmoins parfois de chanter la passion.

L'auteur n'était d'ailleurs pas loin de penser que ses poèmes lui offriraient l'immortalité plus que le théâtre qui le reléguait au rang des saltimbanques voire des malandrins. En dépit de filer droit en sa poésie, l'auteur brouille les pistes là où la sexualité s’adresse autant à aux hommes qu'aux femmes en tant que partenaires.

Le sentiment n'a donc rien de freluquet et segmenté d'autant qu'il est souvent grevé de mort. Quant à la vanité du monde elle n'est en rien évacué. Si bien que Shakespeare reste bien celui que le XIXe siècle avec déjà reconnu comme poète majeur.

Jean-Paul Gavard-Perret

William Shakespeare, Sonnets et autres poèmes, Œuvres complètes VIII, sous la direction de Jean-Michel Déprats et Gisèle Venet, coll. La Pléiade, Gallimard, mars 2021, 1052 p.-, 65 €.

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