Le cerveau mystiquement alvéolé de Haenel

Revoilà le souffle, la trempe, la flamboyance du style Haenel, la grande épopée lyrique dans la même veine que l’admirable Cercle (prix Décembre 2007 & prix Roger Nimier 2008), dernier hussard vivant à oser mélanger les genres pour nous livrer un roman foutraque qui émeut et lave le cerveau. Grand bain de jouvence dans la jouissance de cette lecture-là. Plaisir et beauté convoqués pour nous plonger dans le fantasme de Jean qui n’a qu’une seule obsession : trouver un réalisateur pour son projet de film sur Melville. Sauf que. Le scénario fait dans les sept cent pages et s’intéresse plus à la conception du cerveau mystiquement alvéolé d’Herman que de sa vie son œuvre… Mais pour un idéaliste, rien n’est impossible.

Et force est de constater qu’à force de persévérer il y arrive. Pas directement à dénicher la perle rare qui va lui produire son film, mais tout le moins à prendre langue avec Michael Cimino ; allant jusqu’à solder son compte en banque pour s’offrir un aller-retour à New York pour rencontrer le plus grand réalisateur américain de tous les temps. De cette rencontre qui tournera bien évidemment pas comme il était prévu, va se déclencher toute une série d’événements qui se passeront aussi bien dans un studio avec un dalmatien, dans un grand restaurant avec un maître d’hôtel sosie de Macron et Isabelle Huppert, au musée de la Chasse avec sa directrice à une heure avancée de la nuit…
Cascade de dominos qui projettent sur le narrateur les reflets inattendus d’actes manqués ou d’espoirs douchés. Le tout comme révélateur d’un ailleurs atteignable pour peu que l’effort soit de mise. De défis en révélations, Jean tiendra ferme le cap et d’une dégringolade en enfer renaîtra des cendres de son projet pour mener à bien sa barque sur un lac italien, manière de donner corps au roman, d’ailleurs n’est-ce pas celui-ci qu’il est en train d’écrire ?

On l’aura compris, encore une histoire qui se boucle sur elle-même dans des confettis et sous un feu d’artifice nourri qui enrichit aussi bien la culture générale (des détails de certains films aux œuvres d’art évoquées) qu’il influe une énergie considérable qui redonne envie de se lever le matin !

François Xavier

Yannick Haenel, Tiens ferme ta couronne, Folio, février 2019, 368 p. – 7,90 €

Prix Médicis 2017

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