La chronique d'Emmanuelle de Boysson

Le Prix Littéraire Marco Polo Venise à Sandro Veronesi


La vie littéraire, chronique d’Emmanuelle de Boysson | 

Christine Bach est une belle âme, une femme inspirée, généreuse et amicale dont l’ambition est de célébrer l’altérité et l’universalité des cultures, à l’image de Marco Polo, ce marchand italien, un des premiers voyageurs vers la Chine dont le Livre des merveilles a fait connaître l’Asie aux Européens et influencé Christophe Colomb. Pas étonnant que cette amoureuse de l’Italie ait choisi Venise, carrefour de l’Orient et de l’Occident, pour créer le Prix Littéraire Marco Polo qui récompense un ouvrage d’un écrivain français ou italien. Un prix qui prend une dimension officielle puisque les ambassades de France et d’Italie le soutiennent.

 

Passionnée par la correspondance des arts, Christine Bach a aussi voulu créer des liens entre littérature, musique, théâtre et peinture. Créatrice du Cercle Littéraire Le Rendez-vous rive gauche, elle organise chez Les Éditeurs, au carrefour de l'Odéon, des rencontres littéraires mensuelles de grande qualité. Le Cercle a déjà accueilli Frédéric Lenoir, Natacha Polony, Alain Finkielkraut, Daniel Rondeau, Christian Bobin, Jérôme Garcin, Luc Ferry…



Le jury du Prix littéraire Marco Polo Venise dont elle est membre est présidé par Muriel Mayette-Holtz, directrice de la Villa Médicis. En font aussi partie cette année, les écrivains, Évelyne Bloch-Dano, Michèle Fitoussi, Simoneta Greggio, René Guitton, Daniel Rondeau, Alberto Toscano et Florian Zeller, absent pour cette édition. Réuni au Palais Farnèse à Rome, en présence de Madame l’Ambassadeur Catherine Colonna pour une deuxième délibération, le jury avait désigné quatre romans finalistes publiés dans leur édition originale et parus au cours des douze mois écoulés.

 

Vendredi 10 juin, la Princesse Caroline Murat recevait dans les salons de son palazzio donnant sur un canal, un jardin frais. Le lendemain, dans le palais Morosini de Generali, à Campo Stefano, le prix a été remis à Terres rares, de Sandro Veronesi (Grasset et Fasquelle) par Philippe Donnet, directeur général de Generali Italia, partenaire du prix, et la présidente du jury. La Princesse Caroline Murat, également partenaire du prix, s’est mise au piano pour jouer une Nocturne de Bach. Au cours de la soirée, Muriel Mayette s’est avérée une comédienne de talent. Aux murs, les toiles du maître Jiang Shanqing donnaient une touche moderne aux fastes de la pièce, une inauguration prestigieuse. Logés à l’hôtel Principe, dans des chambres spacieuses et confortables, nous ne nous lassions pas de voir passer sur le Grand Canal des gondoles et des bateaux de marchandises. Sur la terrasse au bord de l’eau, on servait du vin d’Italie, Patricia Chapelotte, directrice de l’agence Alberta conseil, très active pour le prix, trinquait avec Charles Consigny. Caroline Pigozzi, parlait de son cher François, le pape des pauvres tant aimé. L’eau clapotait, ça sentait la rose et le frésia. Au fil des ruelles, nous nous sommes dirigés vers le Rialto près duquel nous avions rendez-vous avec la directrice de l’Alliance française qui occupe un « casino », ancienne demeure où l’on jouait aux cartes pour de l’argent, à l’origine du mot casino. Ce petit palais aurait besoin d’être rénové, les fonds manquent pour réparer les fresques qui se fissurent… Retour aux Frari où la Vierge du Titien semble de plus en plus éclatante dans sa robe orangée. Une fleur sur la tombe de Monteverdi, une promenade sur les Zattere, le long de l’hôtel où Philippe Sollers a l’habitude de descendre, une prière à l’église San Trovaso avant de revoir l’atelier des gondoles. Place Saint-Marc, la pluie se met à tomber, les touristes fuient, l’eau monte. Des vagues roulent sur le campanile. Au musée Correr où nous étions allés voir un tableau de Bellini, les fenêtres suintent. Est-ce l’Acqua Alta ? Non, le soleil revient, nous filons déjeuner à la Madonna près du Rialto : on y trouve les meilleures seiches à l’encre de Venise ! Christine Bach nous attend pour un dernier verre avant de s’éloigner de cette ville-théâtre où nous avons rêvé, par une nuit de pleine lune, sur les marches de la Salute.

 

Emmanuelle de Boysson

 

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