Campo Santo & autres essais

S’ouvrant sur un périple orienté dans les ruelles d’Ajaccio – s’enquérir de l’ombre par une après-midi ensoleillée sans perdre son temps – le promeneur Sebald nous livre quelques perles sur l’arrière-cour de l’histoire napoléonienne tout en dévoilant des lieux insolites où la mer n’est pas la seule beauté à côtoyer, la peinture y fait aussi escale : une Madone de Cosmè Tura, La Vierge et l’Enfant sous une guirlande de Botticelli ou encore L’Homme au gant de Titien, par exemple, valent à eux seuls le déplacement.
Après s’être extasié sur l’île de beauté qui porte effectivement bien son nom, tout en projetant une image synthétique d’une histoire culturelle beaucoup plus brassée qu’elle ne le revendique officiellement – sans doute pour cela que Sebald la choisit pour aimanter l’attention qu’il voulait porter à une certaine vision du monde qui l’habite – ouvre-t-il très vite, après quatre récits emblématiques, l’éventail de son propos qu’il articule autour d’une quinzaine d’essais, évoquant aussi bien une pièce de Peter Handke, Jean Améry ou Nabokov, sans oublier l’éternel questionnement que tout Allemand se pose sur la Seconde Guerre mondiale.
Jamais pompeux, précis et d’une rare objectivité, ce livre concentre toute l’abnégation portée au monde par un homme qui, très vite confronté à ses démons – entre autres, il haïssait son prénom qu’il jugeait marqué de l’infamie nazie – s’exila et entreprit un voyage spirituel par le métissage des cultures. Preuve, s’il en est, que la blessure n’est jamais totalement cicatrisée…
François Xavier
W. G. Sebald, Campo Santo, traduit de l’allemand par Patrick Charbonneau & Sibylle Muller, Babel/Actes Sud, février 2017, 268 p. – 8,00 €
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