Jean Lecoultre le méconnu

À plus de 90 ans Jean Lecoultre suit toujours un itinéraire surprenant né dans l'illumination du surréalisme. Depuis les années cinquante son art est à la fois un art de rupture et de recherche d'identité dans un monde qui se dissout. Il ne cherche pas à plaire en caressant le regardeur dans le sens du poil.

Le peintre vaudois s'inspire de l'univers urbain, de l'Amérique qu'il connaît par les films. Il marque aussi un penchant assumé pour les matières synthétiques. Du Vaudois ont surtout été retenues les gravures. Mais il est créateur de dessins et peintures. Les essais de Florian Rodari et Christophe Gallaz permettent d'entrer dans cette oeuvre exigeante et encore mal connue en France.
Refusant les compromis Lecoultre décime les impostures. Personne a pu la contraindre à exposer ce qu’elle ne jugeait pas valable. Il faut en effet à un "véritable" artiste l’impérieuse nécessité d’une pulsion créatrice. Mais elle n’est rien sans une somme de travail et de connaissance et une volonté incroyable

De loin il est souvent difficile de différencier les lithographies des pièces exécutées à l’aquarelle et au crayon noir, avec des collages. Le regardeur les retrouve sur les tableaux. L'artiste combine collage et dessin, avec un goût pour les figures fragmentaires et les évocations de matières allant du marbre au carreau de céramique en passant par le cuir. Tout se télescope, dans une ambiance inquiétante.
Florian Rodari parle non sans raison d’une cruauté froide mais où la violence est aseptisée si bien que la puissance des "motions premières est maîtrisée. Ce qui leur donne plus de force et paradoxalement d'humanité. Là où il s'agit à la fois de montrer autrement et de dévoiler autre chose.
 

Jean-Paul Gavard-Perret

Florian Rodari et Christophe Gallaz, Jean Lecoultre – l’œil à vif, La Dogana, octobre 2021, 12 CHF

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