Eva Braun, Evita Peron : destins croisés

 Spécialiste des monarchies européennes, l’infatigable Patrick Weber, au travail dès 6 heures du matin, se révèle aussi romancier tenté par les troubles méandres de l’histoire contemporaine. Après s’être inspiré de l’Ordre noir, le voici qui, dans son dernier thriller,  fait se croiser les si dissemblables destins d’Eva Braun et d’Evita Peron. Deux compagnes de dictateurs, deux aventures qu’il parvient à relier par le biais d’une pâtisserie berlinoise de la Potsdamer Platz, la Konditorei Freinehoff. Car le lamentable héros de ce roman, le naïf Karl, le fils du fondateur, a le redoutable honneur de servir à l’une comme à l’autre des deux divas, la fiancée du Führer et la compagne du Conductor,  le divin Apfelstrudel de la maison familiale, à Berlin jusqu’en 1945 pour la première, à Buenos Aires peu après la Chute pour la seconde. Prétexte, on l’aura compris, à une étonnante variation autour d’un mystère historique : pourquoi diable Evita Peron accomplit-elle en 1947 un tour d’Europe, de Madrid à Paris ? S’agissait-il de négocier l’accueil en Argentine de milliers de cadres nationaux-socialistes en fuite ? A quel prix ? P. Weber s’amuse à rouler son lecteur dans la farine tout en reconstituant l’atmosphère glaciale des dictatures, le climat lunaire de l’Allemagne de l’année zéro, la duplicité sans fond de certaines femmes. Victime d’un plan machiavélique, le pion Karl erre, englué dans une toile d’araignée qu’il ne voit ni ne devine jusqu’à la conclusion de ce roman, d’une rare cruauté.

 

Christopher Gérard

 

Patrick Weber, Eva-Evita, pour l’amour du diable, Editions Avant-propos, décembre 2012, 302 p., 18.95€

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