Christian Gonzenbach : céramiques et moteurs

Afin de définir les différences tendances de l’œuvre de Christian Gonzenbach, Karine Tissot, l'auteure du livre a fait appel à de nombreux spécialistes : critiques d’art, scientifiques, céramistes, conservateurs de musée, artistes, philosophes et collectionneurs. Cette pléiade de regards permet de comprendre un profondeur le travail de l'artiste.

Maître des détournements et autres variations a priori farcesques l'artiste crée une oeuvre des plus sérieuses.  Pour preuve sa sculpture créée à l'occasion du 100e anniversaire de la marque automobile américaine Chevrolet né dans la même ville suisse que lui : Louis Chevrolet a conçu des voitures et des moteurs innovants et remporté de nombreuses courses. Soudain, l'impossible devient possible. Et avec ce projet, c'est exactement ce que j'ai réalisé, précisa l’artiste lors de l’inauguration de sa statue.

La surface métallique brillante et lisse fait d'une œuvre a priori massive un objet ailé. Détournant les procédés techniques, l'artiste se livre à des expériences parfois intempestives comme lorsqu'il fit une pièce à partir d’un mélange de kaolin, de plâtre et de poudre de marbre. En cuisant à haute température, elle s’est transformée en chaux vive. Mais le résultat quoique se dégradant très vite révéla une beauté certaine.

Les aléas permettent donc des expérimentations pour lesquels le créateur   à parfois recours à de vieux manuel de techniques où s'apprend par exemple  comment faire du carton-pâte, de  la fausse pierre… L'auteur y cherche des procédés et des choses assez étranges, comme l’emploi de fécule de pomme de terre : Ce que j’associe à cette matière, ce sont des pièces qui commencent à moisir. Cela m’amuserait d’en faire un jour, j’aurai donc de nouveau à consulter ce livre.

Celui qui ne cesse de travailler la  céramique, se livre à des essais d’émaux. Il s'est outillé pour travailler le bois pour réaliser des coffrages pour les moulages en plâtre notamment. Il s'est réservé aussi "coin métal" avec table de soudure. Chaque nouveau projet lui donne l’occasion d’acquérir un savoir-faire et amène son lot d’outils et d'œuvres.

Surgissent aussi bien des jouets dinosaures que des fragments de Michel-Ange. J'ai beaucoup emprunté à ma propre collection, confesse l'artiste, qui a aussi joué des apparences dans une salle des hallebardes, armes suisses par excellence.
Leurs manches se voient ainsi surmontés d'une scie, ou alors d'une pince. J'ai coulé le tout en aluminium. Il s'agit du métal le moins artistique et le moins historique, puisqu'on le connaît depuis cent cinquante ans.  En de telles œuvres la matière approuve le mystère et les possibilités du temps sont digérés. L’espace, l’étendue, la masse se recréent avec le sourire de l’artiste. L’excès bondit hors de tout. La vérité dégénère de manière ludique.
 

Jean-Paul Gavard-Perret

Karine Tissot, Gonzenbook  Monographie 1998-2021, Infolio & L'Apage, septembre 2021, 360 p.-, 60 CHF

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